• Minuscule, de Thomas Szabo & Hélène Giraud (France, 2013)

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Où ?

Au nouveau ciné-cité Paris 19 (entre la Porte d’Aubervilliers et la Porte de la Villette)

Quand ?

Dimanche, à 16h30, en avant-première

Avec qui ?

MaBinôme et MonFils

Et alors ?

Non, l’animation en « double 3D » (dans la composition des personnages, et dans la projection du film en salles) à destination des enfants n’est pas condamnée à être moche, hystérique, débilitante. Minuscule en fait la réjouissante démonstration, en prenant le contre-pied de ces trois écueils auxquels il est si facile de se laisse aller par laxisme et manque d’ambitions. La réussite majuscule du film est née avant même le premier dessin, dans ses fondations écrites. Les options qui vont s’avérer si fructueuses par la suite ont été retenues dès ce niveau, dans les sources d’influence prises pour références et dans les règles de base qui en découlent naturellement. Retenez votre souffle pour lire la liste des ingrédients mobilisés dans la recette de Minuscule : burlesque muet à la Buster Keaton et western à la John Ford, Star Wars et Le seigneur des anneaux, Wallace & Gromit et Panique au village… Il y a même la maison de Pyschose et le plan sur l’escalier vu du plafond.

Les grands savourent et les enfants n’y voient que du feu, mais tous profitent autant de ce que ce travail en amont apporte à la qualité du film. Certaines références aiguillent la narration (la coccinelle qui vient à la rescousse des fourmis comme le hobbit aide les nains ou les humains), d’autres garnissent l’aspect graphique (les changements de plan par balayage façon Star wars, les yeux tout ronds dessinés à la manière de Wallace & Gromit), et il y en a enfin qui établissent le plus important – le ton. C’est là qu’interviennent en première ligne le western et le burlesque, qui apportent à Minuscule leur précieux et inébranlable premier degré. Ce sérieux mis à l’ouvrage, cette volonté permanente d’une tenue cohérente dans le cadre défini prémunissent le film contre toute dispersion pénible ou nuisible. Le cynisme, les clins d’œil gratuits, le trop-plein de gags, toutes ces choses au service de la recherche obsessionnelle de quantité au lieu de la qualité qui abîme tant de films d’animation modernes restent à la porte de Minuscule.

On n’y hâte jamais le pas, mais on laisse se déployer les séquences, leurs idées et leurs enjeux, jusqu’à ce qu’elles aient donné naturellement leur pleine mesure. Il en va ainsi du long premier acte du récit, tout entier consacré au transport du trésor qu’est la boîte de sucre en morceaux depuis le lieu du pique-nique jusqu’à la fourmilière, et aux multiples épreuves que cela suppose de traverser pour les frêles insectes. Ce choix de rythme étonne les petits, malheureusement de moins en moins habitués à la présence de creux pour mieux exacerber le passage des pics, et est tout autant une bonne surprise pour les grands, quand on sait qu’à l’origine du film se trouve une série au découpage autrement plus marqué (des épisodes de cinq minutes). Dans Minuscule, on ne dévie pas non plus du chemin fixé – en particulier la décision de l’absence de dialogues, respectée jusque dans la fugitive apparition d’humains, et qui loin d’être une limitation se révèle un puissant stimulant créatif.

Les sons associés aux différents animaux deviennent un élément central du comique du film, dans la lignée des délires de Tati et de Panique au village. Et la limpidité de l’intrigue est assurée de la façon la plus classique qui soit, par la mise en place d’un découpage lisible et efficace. Honnête et intelligemment conçu, Minuscule est également très beau. Tout y est fait avec beaucoup d’inspiration, l’intégration d’éléments animés dans des décors en prises de vues réelles, le design des protagonistes (l’intégralité du bestiaire est délicieusement kawai en même temps que décalé) et de leurs lieux de vie, les jeux sur les échelles et les distances ; jusqu’à la 3D, qui récolte gracieusement les fruits de toutes les qualités listées auparavant, pour être à son tour un atout à mettre au crédit de Minuscule. Et quand même la 3D va, c’est qu’il n’y a véritablement rien à redire, si ce n’est redire que le film est une franche et complète réussite – la plus belle dans l’animation depuis Ernest et Célestine.

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