• I wish, de Hirokazu Kore-eda (Japon, 2011)

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Où ?

Au cinéma le Balzac

Quand ?

Lundi soir, à 19h

Avec qui ?

MaBinôme

Et alors ?

Révélé au public international lors du passage au Festival de Cannes de 2004 de son film Nobody knows (et du prix d’interprétation remis à cette occasion à son interprète principal alors âgé de quatorze ans), Hirokazu Kore-eda revient avec I wish à une histoire d’enfants. Bien lui en prend, un peu car ses incursions dans l’univers des adultes – Still walking, Air doll – se sont montrées bien plus quelconques, et beaucoup parce que ce nouveau film est une petite merveille de finesse et d’intelligence. La graine en est pourtant une petite histoire de presque rien du tout. Koichi et Ryunosoke, deux frères séparés à la suite du divorce de leurs parents (le grand est parti avec la mère, le petit avec le père) voient leurs nouvelles villes de résidence sur le point d’être reliées par une nouvelle ligne de TGV. Quand Koichi entend un camarade de classe affirmer que si l’on fait un vœu à l’endroit et au moment où deux trains si rapides se croisent, il se réalise, l’affaire est entendue : voilà le moyen de forcer le destin et de vivre à nouveau réunis tous les quatre comme avant.

C’est un synopsis aux allures de court ou moyen-métrage, et il y a effectivement un intervalle en cours de récit où Kore-eda paraît entamer une entreprise de remplissage, pour faire plus long que ce qu’il devrait. On craint alors qu’il ne dilapide une partie du crédit accumulé lors de l’excellente phase d’introduction du film, au cours de laquelle il donne corps à tous ses personnages. Il tisse un fil plein d’entrain et de finesse entre les uns et les autres, flânant dans des chemins de traverse passant par des micro-événements de leurs quotidiens, des détails de leur environnement de villes de province paisibles et assoupies, des haltes auprès de protagonistes tout à fait secondaires mais soignés avec les mêmes égards. Il rend douces et chaleureuses ces vies simples, et il rend proches de nous ces existences très typées, où tout est extrêmement local : les us et coutumes, la nourriture, l’organisation urbaine et la manière dont les habitants se l’approprient. I wish ne gomme rien des particularismes de son petit monde et pourtant il nous fait nous y sentir chez nous, parce qu’il fait tranquillement émerger à la surface des choses l’humanité de ses occupants, le mélange foisonnant de sentiments et sensations, de questionnements et aspirations très similaires aux nôtres.

L’idée de l’accomplissement du vœu s’inscrit naturellement dans la prolongation de cette introduction, car ce sont les enfants qui sont au pouvoir dans I wish. Tout en laissant aux adultes l’illusion de mener les opérations, ils sont décrits – sans trop en faire, toujours avec la même finesse – comme plus intelligents, plus autonomes, plus matures, de ce fait plus soucieux aussi même s’ils savent le cacher, comme des grandes personnes. Kore-eda est tout autant aux côtés des enfants qu’à l’époque de Nobody knows, et l’absence totale de condescendance dans son regard est toujours une formidable bouffée d’air. Au contraire il les traite d’égal à égal, leur laissant toute latitude, leur faisant pleinement confiance. Cette attitude exprime toute sa force dans le dernier acte, quand Koichi et Ryunosoke, accompagnés chacun de son côté de copains venant soumettre leurs propres souhaits, passent des paroles aux actes et partent à l’aventure. Le film embrasse alors pleinement sa nature de conte, parsemé de rencontres merveilleuses et favorables (le coup de pouce de l’infirmière, le couple de retraités qui les accueille et les assiste comme les petits-enfants qu’ils n’ont pas), d’épreuves juste assez compliquées pour que l’on en ressorte grandi, de moments de grâce intense récompensant les efforts et la conviction et débouchant sur un avenir meilleur.

Là encore, comme dans les rapports entre ses aspects local et universel, et entre ses personnages enfants et adultes, la réussite de I wish est une question d’équilibre. Au cours de leur odyssée les héros ont appris à faire des vœux possibles plutôt que puérils, et Kore-eda n’a nul besoin d’invoquer des miracles sortant de nulle part pour les engager sur la voie de leur réalisation. Déjà grands, les enfants ont encore grandi. Les voilà sachant mieux faire pencher la balance vers l’altruisme plutôt que l’égoïsme, et développant la sagesse de distinguer ce qu’ils sont en mesure de changer dans leur vie et ce qu’il faut accepter comme étant hors de leur ressort. L’épilogue en fait la douce et démonstration, tout en nous murmurant qu’il n’y avait pas à s’en faire pour le film : il ne se perdait nullement en route dans sa partie médiane, mais couvait un peu plus longtemps ses richesses pour les faire s’épanouir avec encore plus de beauté le moment venu.

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