• After Earth, de M. Night Shyamalan (USA, 2013)

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Où ?

Au ciné-cité la Défense

Quand ?

Mardi soir en avant-première, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

La planète Terre devenue hostile et dangereuse pour l’espèce humaine, un duo façon la tête (celui qui observe et guide depuis ses écrans de contrôle) et les jambes (celui qui risque concrètement sa peau sur le terrain) contraint à s’y aventurer : sur le papier il y a beaucoup en commun entre After Earth et le récent Oblivion. En coulisses on trouve une autre ressemblance, les deux projets ayant été portés par des acteurs mégastars d’Hollywood. C’est là que les chemins divergent, dans les façons à l’opposé l’une de l’autre qu’ont eu Tom Cruise et Will Smith d’occuper l’espace. Le premier, suivant un système bien rodé et qui a fait ses preuves, a jeté son dévolu sur un sujet porteur et lui assurant un solide premier rôle, puis a choisi un réalisateur en qui il croit et auquel il fait suffisamment confiance pour lui laisser toute latitude dans son domaine de compétence – Joseph Kosinski après Christopher MacQuarrie, J.J. Abrams et d’autres. Loin d’être un producteur aussi avisé, Smith a écouté son ego boursouflé plutôt que sa raison et nous a fait une Howard Hughes, en tous points digne de ce modèle.

Confondant pleins pouvoirs et toute puissance, intérêt général du film et bénéfice particulier, Will Smith a imposé ses vues dans tous les domaines. Concernant le casting, il installe son fils Jaden dans le rôle principal exactement comme Hughes plaçait ses conquêtes du moment au centre de ses films. Quand il avait sept ans, le voir geindre dans les pattes de papa dans A la recherche du bonheur n’était pas trop gênant ; maintenant qu’il en a le double, le retrouver au premier plan toujours aussi pleurnichard et piètre acteur pose un problème bien plus conséquent. Le scénario d’After Earth est pareillement gênant. Smith a pourtant eu une première idée, simple et bonne (un fils doit aller chercher les secours après un accident de voiture en pleine forêt qui laisse son père blessé et immobilisé), qu’il s’est empressé de gâcher par une deuxième – plonger cette intrigue dans une friteuse de science-fiction grandiloquente et fourre-tout. Papa et fiston voyagent en vaisseau spatial, ont les poches pleines de gadgets sophistiqués, et affrontent comme principale menace un monstre chimérique de la taille d’un camion et détectant les humains à leur peur.

Cette course à l’armement des effets spéciaux, forcenée mais finalement très standard dans l’univers des blockbusters, assèche After Earth de toute substance humaine. Oblivion avait l’habileté d’intégrer ce phénomène à son sujet, After Earth y sombre. Avec son personnage commandé à distance par un autre, plus son large bagage de missions à remplir, de compétences à acquérir, d’inventaire à gérer, il avait pourtant tout pour s’en sortir lui aussi par le haut, via le rapprochement avec le jeu vidéo. Sauf qu’à force de renoncements et d’impasses, le film se réduit à un tutorial de jeu vidéo – ce niveau qui compte pour du beurre, sans danger ni engagement, où l’on vous prend par la main pour vous donner un aperçu de toutes les potentialités qu’il s’agira d’explorer plus tard. Un « plus tard » qui, dans le cas présent, ne viendra jamais. After Earth ne dure qu’une heure quarante et s’il arrive si vite à son terme, c’est en se contentant de frôler sommairement toutes les idées croisées en route. Les épreuves sont factices, les solutions pour les surmonter tout autant, grâce à la technologie illimitée mise à disposition des héros ou encore plus crûment par les béances d’un script qui ne va jamais se frotter à la difficulté.

Casting, scénario, reste la mise en scène – ou ce qu’il en subsiste, une fois passé le rouleau compresseur des images de synthèse. En bon disciple de Hughes, Will Smith a embauché à ce poste un yes man de luxe (tout en s’arrogeant une part de la réalisation, d’après ce qu’on peut lire ici par exemple ; ce serait tout sauf surprenant) : M. Night Shyamalan. La descente aux enfers de ce dernier semble sans fin. Après Phénomènes, que je trouve superbe, il avait une première fois consenti à la pratique du compromis hollywoodien pour Le dernier maître de l’air, blockbuster malmené mais encore empreint d’une réelle beauté. Le four de ce dernier lui a visiblement fait baisser d’un cran supplémentaire ses exigences, pour qu’il en arrive à accepter le boulot d’exécutant proposé par Will Smith. D’autres ne sont pas de cet avis, mais personnellement je n’ai rien retrouvé de Shyamalan dans After Earth. Tout le film j’ai attendu, espéré même, qu’il fasse quelque chose de thèmes qui lui tiennent à cœur et qui sont ici à portée de main (quête de soi, confrontation avec la peur). En pure perte : en plus d’être mauvais After Earth est anonyme. Un produit au service d’une star et de sa tentative de cooptation de son fils.

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