• The war, de Ken Burns (USA, 2007)

Je like cet article sur les réseaux sociaux de l'internet!

Où ?

A la maison, sur Arte

Quand ?

2 épisodes (il y en a 14 au total) chaque mercredi soir à 21h. Ils sont ensuite visibles gratuitement pendant une semaine sur le site (très bien fait) de « catch-up TV » de Arte,
Arte+7.

 

Avec qui ?

Seul (et un million de personnes pour chaque épisode quand même, un beau score pour Arte)

Et alors ?

The war en est presque à la moitié de son pèlerinage au long cours (6 épisodes sur 14 sont passés) sur les traces de la Seconde Guerre Mondiale, et il est plus que temps
d’en dire quelques mots – surtout qu’il est tout à fait possible de prendre la série en cours de route, chaque segment apportant indépendamment des autres son lot d’informations méconnues,
d’émotions poignantes, de témoignages individuels précieux. Le réalisateur Ken Burns mêle à la perfection l’intime et le global, l’espoir et le dégoût, les multiples champs de bataille et la vie
au pays.

thewar-2.jpg
La durée intimidante de
l’ensemble (un peu plus de 12 heures) n’est que le reflet fidèle de la démesure de cette guerre, aux récits, fronts et enjeux innombrables. Dans les faits, chaque épisode – inscrit dans une
chronologie globale sans y être pieds et poings liés – s’attarde sur 2 ou 3 évènements précis, avec pour chacun 15 à 20 minutes de témoignages de survivants, d’articles de journaux, d’archives
vidéo et photo de l’époque. Burns remet ainsi dans l’histoire des passages méconnus, plus ou moins oubliés. Plusieurs séquences sont par exemple consacrées à la déroute initiale des américains
dans le Pacifique (en particulier aux Philippines), avec les conséquences horribles qui s’en suivirent. Les populations civiles sont parquées dans des ghettos coupés de l’extérieur, les soldats
prisonniers de guerre survivent dans des conditions innommables – la marche interminable de Bataan, sans boire ni manger pendant 7 jours ; les maltraitances et humiliations extrêmes dans les
camps – relatées sans fléchir par le vétéran Glenn Frazier. Un autre témoin marque particulièrement les esprits dans ces 1ers épisodes : un mitrailleur à bord d’un bombardier dont le récit
met à mal beaucoup de fantasmes idéalisés sur la guerre. Les assauts sur l’Allemagne se font à bord de véritables cercueils volants, sont le plus souvent vains (quand ils touchaient les usines,
celles-ci reprenaient leur activité dans les 2 jours), et entre 2 missions l’ambiance dans les bases était plombée par l’espérance de vie ridicule de chacun, frein terriblement efficace à la
naissance d’amitiés.

En plus de son caractère exhaustif et loyal, The war se distingue par son souci de développer un vrai point de vue, discret mais bien présent, sur l’Amérique de
l’époque. Dire que Burns est polémique serait trop fort ; le cinéaste n’a juste pas envie de se laisser doucement bercer par les images d’Épinal dépeintes après coup. Les tensions raciales -
envers les citoyens d’origine japonaise, ou entre blancs et noirs envers lesquels règne encore une ségrégation des plus violentes – ont droit à de longues séquences, avec un traitement frontal
(images, témoignages, faits divers sordides : un soldat noir tué par un chauffeur de bus blanc pour avoir refusé de s’asseoir au fond, dans la zone réservée aux noirs). Par ailleurs,
The war n’hésite pas à montrer au fil des épisodes les nombreux points communs dans le fonctionnement des 2 mastodontes de cette guerre, les USA et l’URSS, dans une
piqûre de rappel salutaire après 50 ans (et plus ?) de guerre froide. Les jeunes traités comme de la chair à canon, envoyée au front par millions en profitant de leur enthousiasme, la
population maintenue dans l’ignorance des pertes réelles, l’effort de guerre industriel glorifié avec mise en scène d’icônes productivistes représentant un idéal à atteindre pour chaque ouvrier
sont autant de choses habituellement partie prenante dans les dénonciations des régimes totalitaires, et que l’Amérique a bien dû se résigner à adopter entre 1941 et 1945.

thewar-1.jpg

Sur cet aspect comme sur d’autres, The war est une réussite totale qui mène parfaitement à bien son entreprise d’éveil des consciences accessible à tous – un mouvement
également personnifié ces temps-ci par le diptyque de Clint Eastwood sur la bataille d’Iwo Jima. Alors n’hésitez pas, que ce soit sur Internet ou à la télé, plongez-vous dans un ou dans l’ensemble
des épisodes de ce documentaire qui fera date.

Les commentaires sont fermés.