• Soyez sympa, rembobinez, de Michel Gondry (USA, 2008)

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Où ?

 

Au MK2 Bibliothèque, dans une grande salle.

 

Quand ?

 

Samedi après-midi, à la séance de 18h

 


Avec qui ?

Ma femme, et une salle bien remplie. Michel Gondry fait partie des réalisateurs capables de faire venir les gens sur son seul nom.

 


Et alors ?

 

Bien malgré elle, la traduction française un peu geignarde du titre (Be kind rewind, comme il était écrit sur les VHS à louer en vidéoclub) en dit beaucoup sur le nouveau long-métrage de
Michel Gondry. L’idée géniale vendue comme étant au centre du film – des recréations avec des bouts de ficelle de classiques en tout genre du 7è art – n’est en effet que l’arbre qui cache une
forêt beaucoup plus quelconque, voire agaçante par certains aspects.

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Pour une raison génialement farfelue que je ne dévoilerai pas ici, Jerry (Jack Black) et Mike (Mos Def), 2 employés d’un vidéoclub qui loue encore des VHS, doivent réenregistrer avec les moyens
du bord les films que les clients souhaitent louer car toutes les cassettes ont été effacées. Décors en carton, effets spéciaux volontairement cheap et plus rêveurs que crédibles,
astuces en tout genre (du style passer la caméra en mode infrarouge pour tourner une scène de nuit) : en gros, ils font du Michel Gondry. A ce petit jeu de calquer son style sur d’autres
films, Gondry est forcément très inspiré, et les versions « suédées » – terme inventé par les 2 héros pour qualifier leurs chefs-d’œuvre – de Robocop, Rush hour 2 et autres SOS
Fantômes
sont de vraies pépites.

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Mais voilà, ces réalisations ne sont pas la finalité du film, et celui-ci n’est pas un jubilatoire et gratuit dérivé de Clerks où les employés joindraient le geste à la
parole. Elles sont un moyen pour Gondry de faire passer un message (aïe), dont il est lui-même l’auteur (re-aïe, les clippeurs faisant rarement de bons scénaristes). En gros : les grands
conglomérats – immobiliers, cinématographiques – c’est mal, unissons nos forces pour faire renaître le bonheur simple et sincère de la vie de quartier et de la créativité débrouillarde. L’utopie
est belle, stimulante, mais elle traîne 2 boulets : particulièrement égocentrique, et mal fichue dans sa mise en œuvre. En plus d’être incroyablement bavard et laborieux dans son action, le
script écrit par Gondry a bien du mal à faire exister ses personnages, soit parce qu’ils sont unidimensionnels (les 2nds rôles Danny Glover et Mia Farrow) soit parce qu’ils sont trop flous. Les
performances des 2 comiques Jack Black et Mos Def, mal encadrés et navigant à vue (un peu comme Gael Garcia Bernal dans le précédent Gondry La science des rêves, sauf
que dans ce film-là une telle indécision était au cœur de l’histoire), s’en ressentent nettement.

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Plus embarrassante est la réponse apportée par le réalisateur à la sale dictature du capitalisme mondial. Soyez sympas, rembobinez : cette complainte est bien
la sienne, qui nous plonge dans un passé repeint en pastel où tous les voisins sont gentils et prêts à aider, et où la communauté noire du coin fait le spectacle en chantant du jazz et du gospel.
C’était mieux avant, comme dirait l’autre. Et dans cette boule à neige idéale, Michel Gondry tient le meilleur rôle puisque son cinéma mignon et enfantin y est le seul et unique rempart
contre les méchants studios impérialistes. 80 ans de cinéma d’auteur, ambitieux et/ou polémique sont ainsi foulés sans vergogne – 2001 l’odyssée de l’espace,
When we were kings et autres devenant des clips rigolos de 5 minutes façon YouTube – sur le chemin d’une séquence finale prodigieuse de nombrilisme, où le cinéaste
imagine un long-métrage réalisé selon ses préceptes être projeté en plein air sans annonce préalable, et faire se masser dans les rues des centaines de personnes extatiques devant le résultat.
Maintenant qu’il a couché ses démons sur pellicule (La science des rêves, et Eternal sunshine of the spotless mind même si le scénario n’était
pas de lui), Michel Gondry aimerait bien se voir en joueur de flûte de Hamelin. Et nous sommes les petits rats charmés par sa musique.

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