• Mensonges d’état, de Ridley Scott (USA, 2008)

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Où ?
Dans l’avion vers Chicago, en VF, et sur un écran d’environ 15cm sur 10 (mais bon, je pense pouvoir dire sans trop me mouiller que le film ne serait pas bien meilleur sur un véritable écran)

Quand ?
Samedi

Avec qui ?
Seul

Et alors ?

France : 1, USA : 0. J’écrivais dans un article récent que Espion(s), seul film français valable
du début d’année 2009, réussissait de fort belle manière à prendre acte de la nouvelle donne de la géopolitique mondiale. Grisâtre dans les faits – les notions de Bien et de Mal s’étant sacrément
effritées – comme dans les choix individuels qu’elle expose (il n’est plus question de vocation mais de contrainte), cette recomposition des forces en présence bouscule également les fondamentaux
du cinéma d’espionnage. Les règles en vigueur dans ce genre en ce début de 21è siècle seraient-elles plus favorable à la psychologie du cinéma français qu’aux muscles de son homologue américain ?
Peut-être bien. Car le désenchantement et l’introspection détachée de Espion(s) s’accordent aussi bien au sujet que le besoin de Mensonges d’état de spectaculaire
et de se rattacher à des schémas simples peine sérieusement à convaincre.

De toute évidence, Ridley Scott et son scénariste William Monahan (ils ont déjà fait Kingdom of heaven ensemble) semblent pourtant avoir bien pris conscience du changement de
système. Leur film est tout autant une histoire de surplace et de gesticulations improductives que Espion(s), et aborde des questions similaires : une mission complexe et
entraînant des risques mortels – alors même que la certitude que la relative insignifiance de la tâche (face à l’envergure du conflit et des forces en présence) ne quitte jamais ni les
personnages ni le spectateur ; un lien hiérarchique distendu à l’extrême entre l’agent aux prises avec la difficulté du terrain (Leonardo DiCaprio, un poil trop sérieux) et son chef
confortablement campé au QG (Russell Crowe, parfaitement détaché) ; enfin, la préférence accordée par le héros à la perspective d’une relation sentimentale personnelle sur l’engagement total pour
son pays. Les bases sont donc là, mais Mensonges d’état n’arrive jamais à les faire fonctionner correctement. La raison en est que le reste du film n’a tout simplement pas
effectué la même mutation. Peu inspiré par la dureté et la sécheresse du scénario (qui ressemblent pourtant, toutes proportions gardées, à celles de son chef-d’oeuvre Blade
runner
), Ridley Scott signe une mise en scène passe-partout et insipide, qui ne vient jamais apporter un quelconque point de vue sur l’action en cours. Plus dommageable est la
caractérisation caricaturale de tous les seconds rôles arabes qui entourent le duo DiCaprio – Crowe et des intrigues secondaires qui les accompagnent. Une force supérieure (l’inconscient
collectif anglo-américain ?) pousse Monahan et Scott à classer ces personnages selon deux catégories restrictives à l’extrême : résistants machiavéliques et fanatiques ou collaborateurs martyrs
en puissance. Dans les deux cas, la fonction prend le pas sur tout développement d’une réelle personnalité. Le film qui en découle n’est rien de plus qu’une mécanique froide, dans laquelle les
sentiments humains authentiques ne trouvent pas leur place alors qu’ils devraient précisément être au coeur de l’oeuvre.

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