• Lol, de Lisa Azuelos (France, 2009)

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Lol est une déclaration de guerre. L’offensive est intrépide, elle porte sur deux fronts simultanément : celui du cinéma, et celui de la société. Cette deuxième charge rend la
première presque anecdotique, bénigne. Pourtant Lol est un cas d’école, presque trop pur pour être vrai, de tout ce que l’on peut mal faire lorsque l’on s’attaque à la réalisation
d’un film. Les personnages sont ectoplasmiques, et les situations qu’ils traversent sont inconsistantes – vouloir déterminer quelle est la cause et quel est l’effet entre les deux provoquerait un
dilemme du même ordre que celui de l’œuf et la poule. Parler de situations est d’ailleurs bien trop charitable, car ce que le film a à proposer tient plus de vagues idées, extrêmement
volatiles ; quel que soit le tracas présenté (une mauvaise note, un interdit parental, une engueulade…), il s’évapore tout entier le temps de la coupe vers la scène suivante. Et les
protagonistes ne valent pas mieux. Ceux de premier plan sont si mal caractérisés qu’ils s’amalgament tous par grappes indéterminées (ce qui peut s’avérer gênant lorsque l’une des
« intrigues » implique l’ex et le nouveau petit ami de l’héroïne Lola, mais que ces deux-là se ressemblent en tous points), et leurs faire-valoirs entrent et sortent du cadre selon une
règle encore non déterminée. Le petit frère de Lola apparaît ainsi à la fin du premier quart d’heure, sans avoir été introduit lors de la séquence préalable de présentation de la famille…

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La mise en scène est dramatiquement absente, avec pour horizon évident la triste apathie à l’œuvre à la télévision, où tout finit par se ressembler (tiens, comme les personnages de
Lol) ; aux antipodes donc d’une récente réussite de teen movie français, Les beaux gosses, que Riad Sattouf cherchait en permanence à élever au rang d’œuvre de cinéma. Les
acteurs sont tous au diapason de l’énigme Sophie Marceau,
c’est-à-dire à la ramasse et jonglant entre deux expressions pour tout traiter. Mais le pire – et, peut-être, une légère circonstance atténuante pour les comédiens – est atteint par les
dialogues. Sans doute, les ados n’ont pas un vocabulaire des plus fournis ou maîtrisés (et Les beaux gosses, encore lui, faisait de cela un excellent ressort comique). Mais le
degré de dégénérescence de Lol sur ce point est déconnecté de toute réalité, lorsque par exemple chaque apparition d’un des
personnages secondaires s’accompagne dans les trois secondes qui suivent de la réplique « mais quelle grosse te-pu celle-là ». Vraiment. A chaque fois. Les trois premières, ça
énerve ; ensuite, ça provoque son lot d’éclats de rire nerveux.

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Ce pilonnage à tout-va de « grosse te-pu » a sa part dans le bazar moral d’un film qui dit tout et son contraire sur tous les sujets qu’il aborde. Cela concerne la sexualité
(la « te-pu » condamnée sans procès s’habille comme les autres, et fait moins de choses perverses), mais aussi la drogue qui passe d’une scène à l’autre de rassembleur social,
avec les joints qu’on se passe chez les adultes autant que chez les jeunes, à fléau terrible – la conférence éducative, tellement non mise en scène qu’elle édifie le spectateur autant que les
personnages. Mais ce fatras est au choix de la gaucherie, ou un leurre. Car Lol a les idées très claires sur un bon nombre d’autres sujets – des idées aussi à droite qu’il est
possible de les orienter. La fortune financière et patrimoniale de l’intégralité des personnages nous explose au visage dès les premières minutes, et provoque un malaise à la hauteur de son
incontinence obscène : chaque appartement se compte en centaines de mètres carrés, chaque pièce est remplie de signes ostentatoires de richesse, chaque enfant possède – entre autres choses –
un ordinateur portable haut de gamme… Semblables à l’extérieur, ces individus le sont aussi à l’intérieur. Ils partagent une même obsession de l’ordre (avec cette phrase inestimable :
« les mauvaises notes je m’en fous, mais les conseils de discipline ça c’est inadmissible ») ; une même tendance à considérer toute relation sociale sous l’angle du
conflit, avec un haussement de voix ou des insultes qui fusent dès la deuxième ou troisième réplique ; et un même rejet naturel de « l’Autre ». Celui-ci peut être noir ou arabe,
deux catégories dont les spécimens jouent le même rôle du mec débile à qui on tend un flyer et qui ne comprend rien à ce qui est écrit dessus. Il peut aussi être blanc, mais anglais dans ce cas,
et faire alors partie de l’affligeant interlude du voyage linguistique qui ne nous épargne aucun cliché sur les britanniques (la pluie, la nourriture, Lady Di, etc.). Des clichés face auxquels
les lycéens évoluent spectaculairement, puisqu’ils passent à l’égard de leurs hôtes du mépris pur et simple à la condescendance pleine de morgue. Une apologie autosatisfaite de 90 minutes de la
droite « décomplexée », comme on dit aujourd’hui au lieu de dure, voilà ce qu’est Lol.

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