• L’œil du mal, de D.J. Caruso (USA, 2008)

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Où ?

A l’UGC George V, dans une petite salle au fond d’un couloir (normal ; c’est l’UGC George V)

Quand ?

Dimanche après-midi

Avec qui ?

Seul, dans une salle pleine à ras-bord

Et alors ?

Que ce thriller apparemment sans prétentions se transforme en version upgradée 2.0 du séminal Ennemi d’état, voilà qui vaut bien un rattrapage en 2009 d’une sortie en salles
effectuée fin 2008. Ennemi d’état, c’était Tony Scott, Will Smith, Gene Hackman en guest / hommage à Conversation secrète. C’était aussi, symboliquement, la première fois que l’on voyait un plan en images
de synthèse d’un satellite tournant autour du globe et surveillant le héros, passage visuel désormais obligé de tout film d’action/espionnage. Ennemi d’état, c’était il y a déjà
dix ans.


L’œil du mal part avec moins d’atouts, si l’on s’en tient au réalisateur – D.J. Caruso, employé anonyme de studio – et au casting (la transparente Michelle Monaghan et l’à peine
plus charismatique Shia LeBouf). Mais en cela, il est aussi plus symbolique de son époque, où l’importance des solistes – acteurs et du chef d’orchestre – cinéaste est moins critique qu’avant
dans le succès d’un film, et peut être supplantée par la frénésie du rythme des péripéties et des explosions. Dans cette génération de bébés Hitchcock interchangeables (car après tout, sans
Les 39 marches et La mort aux trousses, aurions-nous ces ribambelles de films d’action ?), D.J. Caruso ne s’en sort pas trop mal – grâce précisément au respect de
certaines leçons de base du maître du suspense. Le récit prend vite le chemin accidenté de la course-poursuite, s’interdit de s’égarer dans des digressions romantiques et autres parenthèses
comiques (hormis pour l’épilogue, bateau à souhait mais qui a le grand mérité d’être expédié en trente secondes), et ne génère comme nouveaux éléments et personnages que des choses aptes à
nourrir par la suite sa boulimie d’incidents et de coups de théâtre.


C’est là que L’œil du mal rejoint le chemin tracé par Ennemi d’état. Ses idées de scénario dérivent toutes de la… dérive de notre société moderne vers toujours
plus de sophistication technologique, et la crainte – souvent justifiée – du contrôle rampant qui se masque derrière celle-ci. Sur ce point, la première partie du script est de loin la plus
inspirée, avec son utilisation vertigineuse de tout ce qu’une journée banale en ville nous fait croiser d’écrans divers et variés, pour faire passer aux héros les messages leur indiquant la
marche (forcée) à suivre. C’est Ennemi d’état à l’envers (la technologie pour diriger plutôt que pour détruire), ou bien la scène de l’open space au début de
Matrix, puissance dix. La suite de L’œil du mal fonctionne plus par à-coups, mais elle fonctionne néanmoins. L’idée de fond qui la sous-tend est tordue à souhait
en plus d’être politiquement incorrecte, et le film a la bonne idée de se conclure – épilogue exclus – sur un climax chauffé à blanc dans une salle de spectacle, qu’Hitchcock n’aurait pas reniée.

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