• Heat, de Michael Mann (USA, 1995)

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Où ?
En DVD zone 1 (une vieille édition, avec menus fixes et film qui se lance directement !)

Quand ?
Le week-end dernier, en 2 fois

Avec qui ?
Seul

Et alors ?

Heat date de juste avant que Michael Mann ne trouve son style – juste avant les caméras au format numérique HD et les récits concentrés sur un personnage principal iconique et
torturé. Intéressant virage de l’histoire, qui voit donc ramené au rang de brouillon des merveilles à venir par la suite (Collateral et Miami vice en 1er lieu) un
long-métrage qui était encensé comme flamboyant et mémorable lors de sa sortie.

Ce qui frappe en revoyant Heat, c’est à quel point il est dépourvu de cinéma. Hormis une belle teinte bleutée lors des séquences nocturnes et d’impressionnants plans urbains qui
annoncent la beauté plastique des films à venir, la mise en scène est très proche de la neutralité sèche et efficiente des séries TV. Sur le fond, le rapprochement entre ces dernières et
Heat tombe également sous le sens. La trame du film est classique (un gang de braqueurs qui se lance dans un dernier gros coup, une brigade de flics qui les pourchassent) mais son
déroulement d’une grande complexité. Le récit s’organise autour d’une mosaïque de protagonistes dont les vies intime et professionnelle vont être traitées sur un pied d’égalité – un procédé
typiquement télévisuel. De même, ces personnages sont introduits dès le premier tiers du film, y compris quand ils ne sont pas immédiatement partie prenante de l’action (un bon exemple est le
rôle secondaire de Dennis Haysbert, présenté une heure avant qu’on le revoie dans une autre scène).

Haysbert – futur président Palmer dans 24 – n’est pas le seul parmi les seconds rôles de Heat à s’être fait un nom par la suite : Ashley Judd, William
Fichtner, Natalie Portman. En rajoutant les très bons contre-emplois de Val Kilmer et Jon Voight, cela représente un casting de luxe autour du duo monumental formé par Al Pacino (le flic) et
Robert De Niro (le truand). Dans ce qui est à ce jour le dernier rôle digne de son talent et de sa carrière, De Niro livre une performance saisissante de violence aussi absolue que froide et
déterminée – un prélude au personnage joué par Tom Cruise dans Collateral. L’intensité qu’il donne dans la dernière partie à sa vendetta personnelle et vide de sens rehausse
Heat de plusieurs niveaux.

Cette séquence brutale et imprévue est l’exception à la règle du récit, résumée par une réplique du dialogue entre Pacino et De Niro à mi-film : « Je fais ce que je fais, tu fais ce
que tu dois faire »
. En vertu de ce principe, les personnages n’ont pas d’existence en propre, ils ne sont que leur fonction : gangsters, chasseurs de gangsters, femmes de gangsters.
Des rôles dans lesquels ils étaient déjà installés avant le début du film, et dont ils ne sortiront à aucun moment. Il manque à Heat « la » faille, celle qui sera au
cœur des récits suivants : le retournement contre son employeur surpuissant dans Révélations, le refus de l’enrôlement militaire dans Ali, la prise de conscience
de son vide intérieur dans Collateral, le coup de foudre pour une femme appartenant au camp adverse dans Miami vice. Par rapport à ces films, Heat
ressemble du coup à une belle mécanique qui tourne à vide. La maîtrise narrative – le film dure près de 3h et l’on ne s’ennuie pas une seconde ; il contient une quinzaine de rôles notables et
l’on n’est jamais perdus – et visuelle (les scènes de braquage, quasi-muettes et très longues, se placent dans la lignée de Du rififi chez les hommes) est évidente, mais elle mène
au final à pas grand-chose.

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