• Green zone, de Paul Greengrass (USA, 2010)

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green-1Où ?

Au MK2 Quai de Seine

Quand ?

Le mercredi soir de la sortie, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

 

Les Cahiers du Cinéma ont trouvé une excellente expression pour décrire – en partie au moins – Green zone : « un Wikipedia-film ». Il y a effectivement dans
les intentions du long-métrage une part conséquente de didactisme et d’exhaustivité dans l’explication des tenants et aboutissants de la situation en Irak, juste avant et pendant l’invasion du
pays par l’armée américaine en 2003. Autant de choses tout à fait louables – ce genre de film peut, et peut-être même doit exister pour s’adresser à la frange majoritaire du public qui ne
consulte aucune source d’information allant au fond des choses – mais aussi tout à fait encombrantes. Car s’attaquer à la réalisation d’un manuel visuel du style « La deuxième Guerre du
Golfe pour les Nuls », avec son lot de scènes pédagogiques illustrant les rivalités confessionnelles entre sunnites et chiites, la vie difficile des citoyens irakiens lambda, l’impréparation
des stratèges des USA, etc. empiète sur d’autres scènes qui pourraient prendre forme, et alourdit inévitablement le récit.

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La ligne suivie par Green zone ne manque pourtant pas de panache. Même si toutes les personnes un tant soit peu informées de part et d’autre de l’Atlantique le savent
depuis belle lurette, choisir comme leitmotiv répété à intervalles réguliers le fait qu’il n’y avait en Irak aucune des armes de destruction massive (ADM) prétextées est un indéniable bon début.
Prolonger ce choix en une intrigue délibérément déceptive – le héros, Roy Miller(Matt Damon), cherche la preuve du mensonge sur les ADM mais se heurte à la volonté des décideurs politiques de
propager cette affabulation – donne au film ses meilleurs moments. La peinture qui est faite de l’armée et de l’administration des USA est acerbe au possible. Ce sont deux univers en proie à une
profonde débâcle, bien loin de ce qui devrait être la norme au sein de la première puissance mondiale ; deux univers où tout le monde se tire en permanence dans les pattes et où la supériorité
hiérarchique sert principalement à manipuler ses subalternes par le mensonge et la coercition.

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Tant qu’il suit cette piste, celle d’un Les trois jours du Condor rebooté en plein Bagdad mais cherchant comme son modèle à échapper à l’inévitable ruine de ses
illusion, Green zone parvient à nous agripper et même à nous captiver. Mais un nouvel écueil se profile à l’horizon, tout aussi pesant que le premier : la nature
éléphantesque de la cavalerie américaine version 21è siècle et de sa lourde force de frappe faite de Hummers, d’hélicoptères vombrissants, de lunettes à vision nocturne et autres fusils ultra
sophistiqués. Le scénario n’ayant pas su bannir de son champ d’observation ce genre d’équipements (comme Démineurs a su le faire dernièrement, par
exemple), Paul Greengrass se retrouve avec, en guise de dernier acte, une séquence d’action interminable. Face à la lourdeur pachydermique de ce que celle-ci donne à filmer, même la mise en scène
nerveuse et haletante qui est la marque de fabrique du cinéaste ne peut faire opérer sa magie aérienne. Ainsi entravé par son cahier des charges aux deux extrémités de son histoire,
Green zone reste quelconque et loin des joyaux du début de la carrière de Greengrass – Bloody Sunday, La mort dans la
peau
, Vol 93. Mais il se hisse à l’arraché au-dessus de la moyenne, et marque en cela un rétablissement certain par rapport à La vengeance dans la peau, son très mauvais précédent film.

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