• Crazy heart, de Scott Cooper (USA, 2009) ; et les Oscars 2009, par extension

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crazy-2Où ?

Au ciné-cité les Halles, dans une petite salle pleine (le film est diffusé sur très peu de copies à Paris)

Quand ?

Dimanche après-midi

Avec qui ?

MaFemme

Et alors ?

 

Crazy heart trouvera sa petite place dans l’histoire du cinéma comme le film pour lequel Jeff Bridges, à tout jamais le « Dude » de The big Lebowski,
aura obtenu l’Oscar du meilleur acteur après quarante ans de carrière sur le grand écran. C’est tant mieux, car il aurait été dommage que le film tombe irrévocablement dans l’oubli – comme cela
aurait été le cas pour Boys don’t cry qui a
offert à Hilary Swank sa première statuette. Crazy heart n’est certainement pas le film de l’année mais c’est une de ces belles réussites en mode mineur, touchantes de simplicité,
dont le cinéma indépendant américain nous gratifie régulièrement. Les pièges étaient pourtant nombreux, à hauteur d’un par thème abordé. La musique country, dont le héros Bad Blake est un
compositeur-interprète, donne ainsi depuis pas mal d’années le sentiment qu’elle a d’entrée un pied dans le passéisme momifié ; un présupposé qui ne va pas en s’affaiblissant quand le
personnage principal a 57 ans et que tout indique que sa carrière est derrière lui.

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Au gré des rencontres et des situations ce sont aussi l’alcoolisme, la rédemption, le modèle mille fois vu de la mère célibattante, la transmission sagace entre les générations qui pointent leur
nez. Pourtant c’est tranquillement et sans anicroche, tel un cours d’eau dont rien ne peut interrompre le flux, que Crazy heart s’enroule autour de ces récifs. Il y parvient en ne
cherchant jamais à faire porter aux personnages un poids qui les écraserait, celui de la caractérisation à outrance. Les individus qui traversent le récit ne sont pas là pour servir de
représentation univoque à une communauté, une idéologie. Ils ne sont rien de plus qu’eux-mêmes, ce qui rend l’œuvre plus simple, plus belle. Plus honnête aussi, car les conflits qui l’émaillent
ne sont plus fournis en package avec un coupable, une victime et une explication à reconstituer en suivant les pointillés prédécoupés. Ils sont le résultat d’incompatibilités de
caractères et d’attentes, forgées par les expériences passées. Certains sont résorbables, comme la lutte d’egos qui oppose Bad et son ex-protégé devenu superstar ; d’autres non. L’échec de
la romance entre Bad et la journaliste jouée par Maggie Gyllenhaal doit autant aux écarts éthyliques du premier qu’à l’extrême défiance anti-mecs de la seconde. Bad n’avait aucun droit à
l’erreur, même la plus bénigne ; il paie pour tous ceux qui l’ont précédé.

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Choyés par un réalisateur qui fixe une ligne directrice assurée et un cadre avenant, les comédiens se retrouvent dans les conditions idéales pour dérouler leur partition à la perfection. Maggie
Gyllenhaal, Robert Duvall, Colin Farrell illuminent leurs apparitions plus ou moins courtes, qui se passent toutes dans une belle connivence avec le premier rôle Jeff Bridges. Lequel, par le
mariage entre le scintillement d’un regard toujours alerte et l’affaissement d’un corps fatigué, mêle superbement drame et comédie, renoncement et allant.

 

 

Que s’est-il passé d’autre aux Oscars, à côté de la consécration de Jeff Bridges ? Tout d’abord, la vision assez surnaturelle de Sandra Bullock serrant sa main autour d’un Oscar – même
si elle est une bien meilleure actrice que l’image que la plupart des gens ont d’elle. Il est juste dommage qu’à l’image de l’an dernier (Kate Winslet et son Reader) le film qui
l’a faite triompher, The blind side, semble si inintéressant.

Ensuite, la pointe de déception provoquée, une fois de plus (après Cannes, les Golden Globes, et les BAFTA), par la réduction de Inglourious Basterds à l’un de ses interprètes,
Christoph Waltz. Je doute que Tarantino triomphe un jour aux Oscars ; à moins pour lui de faire un film plus « dans le moule », comme le No country for old men des frères Coen.

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En tout cas, c’est un soulagement que Avatar soit battu (il repart avec trois récompenses techniques, dont une à noter tout de même : la meilleure photographie, qui revient
pour la première fois à une photographie virtuelle puisque le film a entièrement été tourné sur fond vert). Le budget ou le succès commercial, tous deux historiques, du film n’en sont pas la
cause ; simplement le constat qu’une fois retirées la 3D, la motion capture et la campagne de marketing monumentale, on a affaire à un blockbuster somme toute assez quelconque – un
Aliens remis au goût du jour. Un succès aurait causé un précédent assez gênant, en indiquant que l’argent peut peut-être bien tout acheter comme Luc Besson, qui commentait la
cérémonie pour Canal+, semble le penser en allant jusqu’à qualifier de « faute » le fait que Avatar n’a eu ni meilleur film ni meilleur réalisateur.

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En fait, une seule conclusion s’impose : Démineurs, c’est un film sacrément bien. Qui n’a pas volé ses 6 Oscars (pour rappel : film, réalisatrice, scénario, montage, montage son
et effets sonores). La bande de ses jeunes producteurs bras dessus bras dessous sur scène pour récupérer les statuettes du meilleur film était une image euphorisante, la plus marquante de la
soirée avec Ben Stiller grimé en Na’Vi. Par contre, Kathryn Bigelow risque d’être la seule femme victorieuse d’un Oscar pour pas mal de temps ; car elle est plus une exception qu’une figure
de proue d’un mouvement en marche. Avec Jane Campion, et à un moindre degré Sofia Coppola, elle est actuellement la seule réalisatrice d’envergure à Hollywood, donc dans le monde.

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