• Breathless, de Yang Ik-june (Corée, 2009)

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breath-1Où ?

Au Reflet Médicis

Quand ?

Mardi soir, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

 

Une seule scène peut-elle sauver un film entier ? C’est un peu comme se demander si une unique bonne action suffit à racheter un homme. Dans le cas de Breathless
(« aucun lien » avec le film de Godard, comme
dirait Chabat/Karamazov de La cité de la peur), c’est l’épilogue qui vient troubler le jugement sans indulgence vers lequel le reste du film menait. L’histoire de
Breathless repose principalement sur deux fondations. D’une part, des débordements de testostérone (une constante décidemment ces
dernières semaines) qui conduisent les personnages masculins, le héros Sang-hoon en tête, à régler tous leurs désagréments avec leurs poings et à en jouer même en l’absence de menace directe. De
surcroît, le film présente un penchant pour l’allégorie lourde en reproduisant de foyer en foyer la même situation d’extrême violence domestique, où le mari-père frappe à répétition sa femme
et/ou ses enfants. Que ceux qui, au bout de la troisième fois, n’ont toujours pas saisi le message global sur la société coréenne qui se désagrège à force de se brutaliser elle-même lèvent le
doigt.

 

breath-2Dans le sillage de Sang-hoon et de ses apprentis (qui
finiront naturellement par dépasser le maître), qui le mènent de bagarre en bagarre, Breathless déroule sa partition d’ultra violence faussement provoc mais par contre
ultra prévisible. Il est difficile de déterminer s’il s’agit là d’une cause ou d’une conséquence de ce qui précède, mais le film est également trop long. Dommage, car pour son premier
long-métrage Yang Ik-june fait preuve d’un beau talent pour filmer ses personnages comme des humains plutôt que des pions, et ses décors comme leurs lieux de vie plutôt que des arrière-plans
interchangeables. Un grain de sable parvient pourtant à troubler sa trop parfaite mécanique mélodramatique, en la personne du premier rôle féminin Yeon-hue. Cette lycéenne ne se laisse ni
impressionner ni commander par Sang-hoon, bien au contraire c’est elle qui développe peu à peu un ascendant sur lui et le réveille à des sentiments d’empathie, d’attachement envers ses
semblables. Une première scène, sorte de répétition générale, indique à mi-film la voie du salut potentiel de Breathless : une après-midi toute simple de shopping
et de balade passée par Sang-hoon avec son neveu et Yeon-hue, contée en un montage sans paroles (et donc sans hurlements) mais enveloppé dans un cocon de musique électro rassérénante. Sang-hoon
trouve là un petit coin de paix, et des êtres qui apprécient de partager sa compagnie – les deux vont de pair.

 

Une heure de purgatoire plus tard, le spectateur découvre la version pleinement aboutie de cette félicité tranquille ; de cet accomplissement à reformer autour de soi un cercle de confiance
et d’affection. En entrelaçant cet instant délicat, miraculeux (et tellement remarquable dans sa confection), avec la sauvagerie toujours prééminente du quotidien, le dénouement de
Breathless gagne enfin une complexité douce-amère qui est la bienvenue. Cela ne sauve pas tout le film, mais lui accorde tout de même de quoi mériter une petite place
dans notre mémoire.

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