• About a son (Kurt Cobain), de AJ Schnack (USA, 2006)

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Où ?

Au MK2 Beaubourg, qui le passe en exclusivité sur Paris

Quand ?

Jeudi soir, à la séance de 22h

Avec qui ?

Ma femme

Et alors ?


Moribond il y a encore quelques années, le
genre documentaire propose aujourd’hui une quantité et une variété étonnantes d’œuvres, avec en particulier un souci de renouvellement formel de plus en plus présent. Quelques semaines après
Les enfants de Don Quichotte et son dispositif
ancré dans l’immédiateté et la captation de l’action plus que de son analyse, About a son flirte avec les lignes à l’autre bout du spectre – n’avoir que le commentaire, et plus
aucune action. Le film de AJ Schnack a en effet comme source un document totalement dénue d’images, puisqu’il s’agit d’enregistrements audio d’interviews de Kurt Cobain réalisés par le
journaliste Michael Azerrad pour la rédaction d’un livre consacré à Nirvana. Transformer ceci en cinéma relève donc de la gageure – et About a son n’est d’ailleurs qu’en partie
satisfaisant.

Les bandes audio à sa disposition représentant une confession d’une intimité rare et exhaustive de la part du chanteur de Nirvana, Schnack a choisi de se placer dans leur continuité subjective en
leur adjoignant des images qui auraient pu être ce qu’a vu au fil de sa vie le Kurt Cobain qui nous parle à travers tous les haut-parleurs de la salle de cinéma. Paysages – scierie où
travaillait le père de Kurt Cobain, couloirs du lycée d’Aberdeen, taudis de Olympia, lueurs et majesté de Seattle… – mais aussi visages des anonymes qui peuplent chacun de ces endroits défilent
ainsi devant nos yeux. Le concept fonctionne tant que Cobain nous parle de son enfance et de son adolescence, avec une lucidité et un luxe de détails et de commentaires ravageurs. La banalité des
lieux concernés couplée à la capacité d’analyse de notre narrateur donne alors le sentiment de suivre un pan d’histoire de l’Amérique d’aujourd’hui, où la masse standardisée et les individus à la
marge vivent de part et d’autre d’un fossé infranchissable. Cette histoire est à la fois intimiste et générique, hautement réaliste (un homme nous parle de ses propres souvenirs) et
fictionnelle : l’évocation par Cobain de son calvaire d’ado « différent » au lycée semble ainsi pouvoir s’enchaîner tout naturellement sur Elephant, d’un plan à l’autre.


About a son cale lorsque l’on arrive – d’un seul coup, sûrement comme lui-même l’a ressenti – au présent de Cobain. L’expérience intime de ce dernier ne se fait alors plus
vis-à-vis du reste du monde, mais coupé de celui-ci, sous le double effet de la réclusion qui va de pair avec la célébrité et de l’introspection de la création artistique. Fidèle à son idée de ne
pas montrer d’images de Cobain (puisque nous sommes « dans sa tête »), Schnack lutte pour trouver de quoi illustrer les propos du chanteur. Lesquels propos nous touchent eux-mêmes
moins ; Kurt Cobain, de plus en plus perclus de douleurs physiques insoutenables et de paranoïa mentale, s’éloigne peu à peu de nous, des ses congénères humains. Et retrouve son idée fixe
d’enfant d’être un « alien », abandonné sur Terre. On sait où cette route s’est achevée.

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