• Expendables 2, de Simon West (USA, 2012)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Mardi soir, en avant-première

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Sylvester Stallone n’a besoin de personne. Devant la caméra, pour distribuer les rafales de balles et les torgnoles une fois qu’il est à court de munitions. Et derrière la caméra, pour donner naissance à de belles idées de films artistiquement valables… puis pour les dégrader, de son propre chef et sans nul besoin d’une intervention extérieure, en de vulgaires franchises commerciales toutes entières tournées vers le profit immédiat. Il l’a fait avec Rocky et Rambo, éreintés par de médiocres suites à répétition ; puis avec le touchant requiem pour un Rocky Balboa usé et cassé, la reprise du même postulat pour John Rambo aboutissant à un horripilant nanar. Expendables, dernière variation en date du même thème qui obsède Stallone depuis ses débuts (le héros du bas de l’échelle, prolétaire qui n’a que ses muscles et son honnêteté à offrir, et se fait exploiter et mépriser jusqu’à enfin obtenir, peut-être, son petit bout de reconnaissance), suit la même voie de garage express : après un premier volet réussi, car percutant et intègre, le deuxième oublie toutes ces bonnes résolutions et ne pense plus qu’à encaisser les dividendes de la rente.

Cette mauvaise nature ne se révèle pas immédiatement. Au contraire, Expendables 2 commence très bien en reprenant les choses là où le premier les avait laissées, par une ahurissante séquence d’action brute à rallonge – un bon quart d’heure, au jugé. Superbement rythmée, explosive dans tous les sens du terme, toujours pleinement lisible, et remplie de petites idées qui épicent le tout et font mouche l’une après l’autre (une manœuvre pour se débarrasser d’un groupe d’ennemis, la révélation de l’identité d’un acteur, un changement soudain de moyen de transport, etc.), ce prologue est en quelque sorte l’équivalent de la folle ouverture d’Indiana Jones et le Temple maudit, mais avec plus de morts par balles. On se pince un peu pour y croire, mais la connexion avec le film de Spielberg semble en mesure de se maintenir alors que l’intrigue principale d’Expendables 2 se met en place, avec son méchant halluciné (interprété par un très bon Van Damme) qui fait travailler comme esclaves dans une mine les habitants des villages environnants, ou encore cette amusante péripétie à l’esprit très Indy du coffre à récupérer en entrant un code qui change toutes les deux minutes.

Et puis, Stallone choisit soudain de laisser tomber tout ce qui ressemble de près ou de loin à une ambition cinématographique. Peut-être parce qu’il en était rendu à ce point du script quand il a reçu la confirmation de la venue des guest stars auxquelles il avait envoyé des invitations – Chuck Norris, le duo Willis / Schwarzenegger pour une contribution bien plus conséquente que dans le premier épisode. Quelle qu’en soit la raison, le film arrête soudain d’en être un et tourne au pur numéro de fan service, conçu à la va-vite et dépourvu d’âme. La cohérence narrative est foulée aux pieds, avec des comédiens qui entrent et sortent de l’arène comme dans un moulin. Même punition pour l’inscription dans la durée des scènes d’action, ce qui est rageant puisque celles-ci restent, même sous forme de bribes, efficaces et intenses. Ce n’est que du bourrinage, mais c’est du bourrinage de qualité, fait par des gens qui s’y connaissent en la matière, dont le réalisateur Simon West, qui avait fait le correct Les ailes de l’enfer au siècle dernier avant de disparaître de la circulation.

Le récit se retrouvé lesté d’un tempo cahotant, mal fichu, car tout ce qui devrait relever de l’ornement vite expédié (nouveaux personnages secondaires, scènes de transition, bons sentiments manichéens) prend une place exagérée, et nous fait subir son assemblage de clichés faisandés et de bavardages piteux. Surtout, pour achever toute possibilité que Expendables 2 se tienne, avec un minimum de prestance, Stallone laisse tomber la part dramatique de son écriture pour se concentrer exclusivement sur les saillies comiques. Dit crûment, il abandonne ce qu’il sait faire pour se concentrer sur ce qu’il ne sait pas faire. Les gags et punchlines ne volent pas très haut, et leur manque d’inspiration devient vite tel qu’ils tournent en boucle ; voire même s’en remettent à des blagues extérieures au film (un Chuck Norris fact par-ci, une mention de Rambo par-là), blagues faciles, indigentes, embarrassantes. Une fois tout cela mis bout à bout, Expendables 2 finit par ressembler à un show de catch old stars en décors extérieurs (mal exploités de surcroît), lourdaud et sans flamme. Loin, très loin de son point de départ.

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