• The artist, de Michel Hazanavicius (France, 2011)

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Où ?

A l’UGC Opéra

Quand ?

Jeudi soir, à 19h30

Avec qui ?

MonFrère

Et alors ?

En ajoutant deux-trois petites choses au genre des parodies et pastiches (vraiment rien : de l’intelligence, de la mise en scène), Michel Hazanavicius n’a eu de cesse de tirer celui-ci vers le haut et de l’imposer comme un art majeur et légitime. L’exceptionnel travail de montage et de doublage de La classe américaine a métamorphosé un détournement comique en un film culte à la transmission virale phénoménale. OSS 117 premier du nom, Le Caire nid d’espions, a obtenu un succès public plus vaste, plus classique aussi (plus de deux millions d’entrées en salles), sur un canevas pourtant très subtil et hardi de combinaison entre la raillerie d’un type de film qui le mérite bien – les récits d’espionnage ersatz de James Bond – et son actualisation au service d’une égratignure astucieuse d’une certaine vision de la France, elle aussi avariée. Et cette année, avec The artist, Hazanavicius a fait rien moins que mener son genre de prédilection au Festival de Cannes – et une bonne place aux Oscars lui est déjà promise par beaucoup.

Pour ce dernier ouvrage en date, le cinéaste a une fois de plus modifié de manière conséquente son approche, plutôt que de se contenter de la plate répétition d’une recette éprouvée. Le nouveau terrain de jeu est le cinéma muet, domaine qu’Hazanavicius aborde avec un égard et un sérieux qu’on ne lui connaissait pas. Du pastiche, il s’éloigne d’un pas de côté pour s’installer plus dans l’hommage. L’humour de connivence avec le spectateur est cantonné à des gags présents en nombre limité et distillés un à un au fil du récit. The artist se veut avant tout être un film mélodramatique comme on en faisait au temps du muet, avec format d’image 1.33, noir et blanc, musique d’accompagnement jouée par un orchestre et intertitres pour les dialogues nécessaires à la compréhension de l’intrigue et des sentiments. L’idée est belle, et joliment ambitieuse comme toujours avec Hazanavicius. Mais l’exécution est trop inégale, approximative pour que le film soit à la hauteur. The artist est en cela à l’image du précédent long-métrage d’Hazanavicius, le deuxième volet d’OSS 117, Rio ne répond plus. S’y trouvent, à l’échelle de la scène, des trouvailles de script et de réalisation remarquables, qui touchent dans le mille la cible du projet. Cette vision un peu folle d’une œuvre mêlant avant-hier et aujourd’hui, sans qu’aucune couture ne soit discernable, se concrétise particulièrement dans les moments de séduction platonique entre les deux héros, la star du cinéma muet George Valentin (Jean Dujardin) et la jeune inconnue qui gravit les échelons Peppy Miller (Bérénice Béjo) – la prise de film à refaire plusieurs fois car George n’arrive pas à se concentrer, l’étreinte mimée par Peppy avec le costume dans la loge.

Hazanavicius s’approprie également avec bonheur des techniques caractéristiques du cinéma muet, tels que les silences musicaux et les ellipses. Malheureusement l’inspiration lui fait défaut pour étendre ces réussites ponctuelles sur l’intégralité de son film. Le scénario de The artist est trop faible sur deux plans essentiels, la destinée des personnages et la matière dramatique fournie à la mise en scène afin que celle-ci y fasse prospérer son imagination. Sur ce second point, The artist se recroqueville trop fréquemment sur des modèles de séquences qui n’ont jamais arrêté, jusqu’à aujourd’hui, d’être traités à la manière du muet par le cinéma : les montages accélérés, les cauchemars. Le chemin emprunté par Hazanavicius est donc en réalité assez confortable, avec une prise de risque pas aussi grande que ce que l’on pourrait croire. Sa pratique du muet est light dans la forme. De même que sur le fond, ce qui pose un peu plus problème car il semble là que la cause en soit la considération mineure qu’il a pour le cinéma muet. Hazanavicius donne l’impression de n’avoir des films de cette époque que l’image des divertissements simplistes qu’il fait tourner à George Valentin, à la dramaturgie minimaliste et aux comédiens surjouant à tout-va. Pourtant l’époque du muet avait tout autant que le cinéma contemporain son lot d’œuvres aux scénarios foisonnants et aux intrigues complexes. En l’ignorant ou en feignant de l’ignorer, Hazanavicius rabaisse, par mimétisme, The artist au niveau d’un de ces mélos manquant de consistance (la deuxième moitié comporte de sérieuses longueurs) et de ce fait ordinaires quelle que soit l’époque à laquelle ils sont réalisés. Par ricochet, la défaillance du récit donne une importance plus marquée à ces traits d’humour insérés dans les marges, et qui se distinguent d’autant plus qu’il n’y a pas grand-chose pour leur faire de l’ombre. Le positionnement du film entre premier et second degré de lecture, entre la force du drame et la douce ironie du pastiche, s’en trouve brouillé.

2 réponses à “The artist, de Michel Hazanavicius (France, 2011)”

  1. pim_pam dit :

    je ne suis pas d’accord mais c’est intéressant.

Répondre à erwandesbois