• Restless, de Gus Van Sant (USA, 2011)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Lundi soir, à 19h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Restless est assurément une étape mineure dans la filmographie de Gus Van Sant. Encore faut-il bien s’entendre sur le caractère relatif de ce qualificatif – on parle ici d’un cinéaste ayant réalisé des pépites telles que Elephant, Last days ou encore Paranoid Park (pour ne parler que de sa période la plus récente), ce qui lui donne pas mal de marge pour faire des films effectivement inférieurs tout en restant au-dessus de la moyenne. Restless est de ceux-là. En plus, ses principaux défauts sont relatifs à son script et le travail de Van Sant afin de les gommer mérite bien des éloges.

Le scénario de Restless est en effet un modèle du genre peu estimable du récit-concept indie américain, qui se rengorge de sa position de marginalité vis-à-vis du courant dominant alors même qu’elle n’est que toute relative. Soit ici, un couple d’ados amoureux dans une ville moyenne anonyme, avec pour particularités, outre leurs prénoms (Enoch, Annabel), que lui est fasciné par la mort – il s’incruste aux enterrements, a pour ami imaginaire un pilote kamikaze japonais – et elle condamnée à court terme par une tumeur au cerveau. C’est à peu près tout, le scénario se contentant à partir de là de décliner, sans grande créativité dans les variantes, des scènes montrant l’intimité des deux héros ou bien les confrontant au monde extérieur. Entre de mauvaises mains, ou même simplement des mains moyennes, un tel matériau aurait tout à fait pu donner un film insupportable de mièvrerie vaine. Mais il suffit que vous le mettiez entre les mains de Gus Van Sant, que vous le regardiez appeler des gens eux aussi talentueux pour l’entourer – le directeur de la photo Harris Savides, qui a fait la lumière de l’essentiel de ses films depuis A la rencontre de Forrester ; l’actrice Mia Wasikowska vue dans In treatment –, et à l’autre bout de la chaîne du tournage et du montage vous obtenez une œuvre touchante.

Van Sant est parvenu à extraire du brouhaha incertain du script un délicat murmure trompe-la-mort, et à en faire la note dominante. Enoch et Annabel emploient tout leur temps passé ensemble à cette tâche, soit en désacralisant la mort soit en faisant briller la vie un peu plus fort que son éclat naturel. Ce pas de côté par rapport à la marche normale des choses est incarné de très belle manière par Wasikowska (dans le rôle d’Enoch Henry Hopper est moins marquant), et capté avec beaucoup de grâce par Savides qui s’applique à détacher visuellement, de manière subtile, les deux héros du monde qui les entoure. Grâce au talent de ceux qui l’ont porté à l’écran, Restless trouve ainsi la distance idéale par rapport à son sujet, et parvient à nous émouvoir avec douceur, simplement. C’est un frôlement tendre là où d’autres, moins habiles, sont contraints de recourir à une artillerie trop lourde pour espérer en faire de même. Je pense à La guerre est déclarée, que ses effets de manche appuyés dans toutes les directions (le drame, la comédie, le lyrisme) rendent criard et emprunté, bien loin de ce qu’un cinéaste subtil comme Van Sant est capable d’accomplir.

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