• Quelques heures de printemps, de Stéphane Brizé (France, 2012)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Vendredi soir, à 22h30

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Prenant les devants en sortant un mois avant le palmé Amour, Quelques heures de printemps vient nous entretenir du même « sujet de société », la fin de vie. Lorsque la vieillesse devient agressive, et plonge le corps dans l’incapacité de fonctionner normalement, ouvrant la porte à la question du choix : dépérir naturellement et dans la souffrance, ou garder le contrôle de son existence et décider d’y mettre un terme avant qu’elle n’en vaille plus la peine. Amour et son héroïne victime d’attaques successives explore la première voie ; Quelques heures de printemps traite de la seconde. Yvette / Hélène Vincent est atteinte d’une tumeur au cerveau, dont elle compte prévenir l’issue fatale en recourant à la pratique du suicide assisté, en Suisse, où elle est légale. Son fils Alain (Vincent Lindon), contraint de revenir vivre chez elle car se retrouvant sans ressources après avoir purgé une peine de prison, va l’accompagner dans cette ultime démarche.

A l’image de cette manière de forcer la main à Alain pour qu’il cohabite avec sa mère, l’intrigue tissée par Stéphane Brizé abonde de bonnes idées qui lui permettent d’éviter beaucoup d’écueils en puissance. Quelques heures de printemps échappe ainsi au piège du débat didactique et artificiel, aucun de ses personnages n’étant investi de la mission de mettre en question la décision d’Yvette. De même, il déjoue le risque de la noyade dans l’eau de rose consensuelle. Yvette et Alain se haïssent copieusement et ouvertement, parce qu’il n’y a malheureusement aucune raison pour qu’une maladie grave fasse que deux personnes qui ne se sont jamais aimées trouvent miraculeusement le moyen d’y parvenir. Tout le film est fait de ce même bois, très brut. Il s’en tient à des actes et des faits relevant du concret, fermant la porte à tout embryon d’introspection. C’est à la fois un bien (raconter une histoire simplement, sans surmoi, est l’une des meilleures façons de faire du cinéma), et un mal. Un mal car Brizé tombe dans l’excès de zèle, en faisant de son minimalisme une obsession – cohérente à tous les échelons du film, mais dommageable. Brizé tient absolument à éviter de prêter le flanc à l’emphase, aux sentiments. Retenue qui tourne à la rétention, d’émotions et d’évolutions, et engage le film dans une impasse proprement étouffante.

Visuellement autant que narrativement, plus rien de ne bouge, littéralement. Les cadres sont raides et exigus, et les séquences estampillées « vraie vie du quotidien des petites gens, garantie sans additif artistique » s’y succèdent de manière excessivement répétitive. Comme il se refuse à déplacer ses personnages dans quelque direction que ce soit, Brizé se condamne à reproduire à l’identique une suite de non-évènements – dîner devant la télévision sans se parler, voir le voisin, aller à l’hôpital – dont la banalité reste vide de sens. Rester terre à terre devient un dogme abusif et accablant, ayant pour résultat la dévitalisation des protagonistes. Pour les « gentils », figures annexes éparpillées ça et là, elle intervient instantanément. On ne croit jamais aux personnages du voisin, du flirt d’Alain, trop grossièrement esquissés. Pour les revêches Yvette et Alain, elle surgit en fin de parcours, lorsqu’ils prennent congé de nous et que l’on se rend compte que cette séparation ne nous impacte pas autant qu’elle le devrait. Parce qu’ils n’ont pas été développés par le film, ils ne sont pas devenus des sujets à part entière. Ils sont restés à l’état d’objet d’observation, pour une étude valable sur le fond mais qui suit un protocole beaucoup trop distant et rigide.

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