• Of men and war (Des hommes et de la guerre), de Laurent Bécue-Renard (France, 2014)

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Où ?

Au Cinéma du Panthéon

Quand ?

Dimanche, à 14h30

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

La guerre, c’est pas beau à voir. Le constat sonne comme une évidence, ce qui peut le faire sombrer dans la banalité et la vacuité – Fury en a apporté le plus récent exemple. Mais si l’on prend le temps de creuser la question, en adoptant la bonne posture à son encontre depuis le bon emplacement, l’évidence devient vérité, forte et collective. On ne réduit plus la problématique de la guerre à des poncifs prédigérés, au contraire on tente de se hisser à la hauteur de l’emprise qu’elle exerce sur l’humanité. D’où la formule générale que le réalisateur Laurent Bécue-Renard a choisi pour nommer son film : Of men and war, à propos des hommes et de la guerre. Toute forme de contextualisation, de particularisation est mise à l’écart, jusque dans l’identité des soldats de retour du front que nous allons côtoyer durant plus de deux heures. Aucun nom de famille, et des prénoms relégués au générique de fin – au cours du film, je n’ai saisi qu’une seule fois où un prénom était prononcé (mais j’ai pu en rater).

Ces hommes sont américains, reviennent d’Irak, vivent en Californie. Tout ceci est circonstanciel, lié au contexte de production du film ; c’est ce qui vient en amont de celui-ci, mais n’a pas à en être partie prenante. En accompagnant ses protagonistes sur le temps long (cinq ans), et dans des cadres (en famille, et au centre d’aide aux vétérans qui propose un suivi par des thérapeutes) où il leur est impossible de dissimuler la moindre part de ce qu’ils ressentent, Bécue-Renard va droit au cœur terrible du sujet : l’effet de la guerre sur les hommes. Of war in men. C’est un effet mental, mais si violent qu’il génère des manifestations physiques agressives, incontrôlables et incessantes. Vomissements, pleurs, tremblements, la caméra enregistre frontalement comment les corps en apparence puissants de ces hommes craquent, et s’effondrent, désagrégés de l’intérieur par le PTSD (Posttraumatic stress disorder) qui les possède – au sens de la possession démoniaque. Le principe du documentaire, comme documentation du monde, est appliqué avec une grande pureté dans Of men and war, où ce qui apparaît à l’écran est la réalité brute des choses, sans interprétation ni intermédiaire.

L’interprétation, via l’expression verbale des horreurs vécues à la guerre, et les intermédiaires, que sont les psychiatres et les proches, permettent justement d’ouvrir une voie vers une hypothétique guérison, qui passe par la domestication de cette réalité traumatisante. De la somme des témoignages qui émergent de la bouche des soldats, après plus ou moins de résistance, il ressort l’expérience d’une épreuve commune à tous. Tel Orphée, chacun d’entre eux a pénétré dans le monde des morts, à son corps défendant et de manière atroce – que ce soit en frôlant soi-même la mort, en la causant, en ayant à s’occuper des cadavres qu’elle produit. Mais les vivants ne sont pas faits pour passer ainsi de l’autre côté, puis revenir. Après la guerre la mort s’enracine en eux, dans leur âme et leur chair qui deviennent le lieu d’une rencontre contre-nature ; entre cette mort et la vie que les soldats retrouvent soudain tout autour d’eux, jusque sous sa forme la plus futile, bouclier des vivants pour maintenir aussi loin que possible tout soupçon de morbidité.

N’ayant plus accès à ce divertissement pascalien, puisqu’étant devenus des morts-vivants, les soldats souffrent le martyr en attendant l’issue de cette nouvelle bataille qui se joue en eux. L’épilogue de Of men and war montre que la victoire peut revenir à la mort, ou bien à la vie. La lueur d’espoir naissant dans ce second cas nous fait l’effet d’un miracle, même si elle n’évacue pas toute la noirceur accumulée auparavant. La mise en scène de Bécue-Renard, parfaitement discrète jusqu’alors, s’affirme avec justesse dans ces dernières séquences pour porter les émotions qui nous accompagneront après la fin de la séance. Peu de temps avant, elle avait déjà été prise d’un premier soubresaut ; lors d’une parade à la gloire des USA, où se retrouvent embarqués les vétérans alors même que c’est bien leur pays qui a transformé leurs vies en enfer. La déloyauté de la situation fait sortir le réalisateur de ses gonds, de sa neutralité. Car la guerre n’est pas une fatalité, il y a toujours quelqu’un qui la provoque puis a besoin de troupes pour l’alimenter.

Une réponse à “Of men and war (Des hommes et de la guerre), de Laurent Bécue-Renard (France, 2014)”

  1. PAPA dit :

    Bien, je suis en train d’écouter votre Kaboom sur Gone Girl que nous avons vu ce matin et beaucoup aimé, malgré par moment des manques de rythmes ou du « déjà vu »

    VOUS etes tous passé à côté du film de Fincher. le sujet de base n’est pas le couple, qui n’est qu’un prétexte, l’argument; alors que le sujet de fond est l’APPARENCE ; n’oubliez pas le titre du roman. Les 2 personnages du couples,sans être éffacés, sont supplantés par 2 autres : La vedette du talk show TV, donc le TV et l’avocat. Le 3eme élément c’est la mise en scène par Amy des APPARENCES qui vont la rendre crédibles, soit à la TV, soit dans son environnement local. : la meilleure amie, le « bucher ».
    Le rôle du couple dans cette affaire est illusoire. C’est Amy qui mène tout le film avec ses « jeux » pour faire croire ce qu’elle n’est pas. Et ce du début à la fin : Disparue ou morte? C’est elle qui décide. Son mari gentil ou méchant? C’est la TV.

    En fait nous ne sommes que ce que les gens croient que bous sommes (apparences) et non pas ce que nous sommes vraiment. Demandez aux politiques… c’est leur métier.

    Donc, juste un conseil : revoyez le film une 2eme fois

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