• Upside down : the Creation Records story, de Danny O’Connor (Angleterre, 2010)

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Où ?

A la Gaité Lyrique, dans le cadre du festival Filmer la musique

Quand ?

Jeudi après-midi, à 14h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Upside down appartient à cette catégorie de documentaires dont l’intégralité de l’intérêt est comprise dans le sujet traité. Un beau R.A.S. sanctionne le point de vue, aveuglément passionné et ne prenant donc aucun recul, autant que l’aspect formel, qui ne se distingue en rien du modèle générique du documentaire de rock. Récit roller coaster où les déchéances le disputent aux retours en gloire, montage survitaminé, bande-son de circonstance et forcément enthousiasmante, panachage d’entretiens rétrospectifs et de documents d’archives – pour être aimable, sur ce dernier point on accordera un bon point au film pour son idée de présenter les interviews actuelles en noir et blanc, et les faits d’armes du passé pris sur le vif en couleurs. En somme, d’avoir placé la vie du côté de l’époque où le label Creation Records était actif, plutôt que du présent qui se poursuit sans lui. Le nom du label en question ne parle peut-être qu’aux initiés (dont je ne faisais moi-même pas partie jusqu’à deux mentions dans des articles quelques jours avant la projection du film), mais la liste des groupes que l’extravagant Mr. Alan McGee, armé de son flair et de sa toute petite équipe, a découverts, produits et offerts à l’oreille du monde durant deux décennies est extraordinaire.

Pour ne citer que le haut du panier, ce dont il est question ici regroupe The Jesus and Mary Chain, My bloody valentine, Ride, Primal scream, Teenage fanclub, et bien entendu l’apothéose Oasis, ou comment un petit label indépendant peut sortir un disque à 14 millions de ventes, (What’s the story) Morning glory ?, et organiser dans la foulée l’un des plus grands concerts de l’histoire sur le sol anglais, à Knebworth à l’été 1996. Upside down réussit à faire coexister de manière équilibrée le talent musical inné de ces groupes (dont au moins un membre de chaque apporte sa collaboration au film – le « dissident » Noel Gallagher pour Oasis) et la part de leur succès qu’ils doivent à leur producteur, le héros du film, Alan McGee. Lequel, en plus d’être un bon client car il a été pendant plus de dix ans en phase avec l’histoire en train de se faire du rock, du post-punk à la britpop en passant par la house music, l’est aussi par l’énergie ahurissante qui l’anime et se traduit par les pires frasques et les plus belles audaces. Le réalisateur Danny O’Connor aurait eu tort de ne pas lui donner les clés du film, tant McGee est en mesure de fournir tout ce dont une bonne histoire a besoin : une introduction originale – de glandeur de cité à rockeur en herbe, gérant de bar/salle de concert et enfin producteur, le tout au gré du vent ou pas loin –, des coups d’éclat dus à la drogue, des drames occasionnés par la drogue, des anecdotes savoureuses impliquant de la drogue…

Oui, il est presque autant question de drogue que de musique dans Upside down. Cette matière permet au film de se distinguer de la masse, puisque les stupéfiants ne sont pour une fois pas traités comme une calamité absolue, source de tous les maux des protagonistes ; ils peuvent aussi dispenser un pouvoir créatif immense. La retranscription fidèle de cette dualité du rapport à la drogue, vieille comme le rock’n’roll (les Beatles et le LSD, pour ne citer qu’un seul exemple lointain), est une expression parmi d’autres de la qualité première de Upside down : son âme radicalement et irrémédiablement rock. De la première à la dernière minute, chaque instant y est vécu à fond et en même temps immédiatement remplacé par le suivant une fois qu’il a fini de servir. Le but est de rester au sommet de la vague, dans le bouillonnement de l’écume, à pleine vitesse, à tout prix. La fin du label, et avec elle celle du film, est un modèle dans le genre.

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