• The Shanghai gesture, de Josef Von Sternberg (USA, 1940)

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Où ?
A la maison, en DVD (édition zone 2, Films sans Frontières)
Quand ?
Ce week-end
Avec qui ?
Seul
Et alors… ?

Déjà vu il y a quelques années dans une des salles du réseau Action, The Shanghai gesture m’a refait la même impression – mais avec cette fois-ci le bagage cinéphile
pour mieux pouvoir l’interpréter. Le diptyque L’ange bleuMorocco avec Marlene Dietrich trace en effet le chemin vers ce dernier grand film
de Von Sternberg : exotisme baroque, scénario prétexte, symbolique moraliste forte, et en même temps sensualité débordante qui irrigue l’ensemble du film.

 

Dans The Shanghai gesture, ce qui est difficile à appréhender de façon tangible pour le néophyte (mais que l’on ne peut pas ne pas ressentir – là est la force du film)
est que tous ces éléments sont portés à leur point d’incandescence, les 94 minutes du film n’existant que par leur sous texte érotique et leur ouverture à une analyse culturelle et psychologique
poussée. Les protagonistes ne sont que des pions sans existence concrète : malgré toutes les questions que posent leurs habits, leurs répliques, on ne saura jamais clairement d’où ils viennent ni
comment ils sont arrivés dans ce casino de Shanghai. Privés de passé, ils le sont aussi d’avenir, puisque les enjeux les concernant ne sont qu’esquissés. Il n’y a pas d’intrigue à proprement
parler dans le film, hormis celle qui concerne le maintien ou non de l’existence du casino.

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C’est bien lui, le seul protagoniste de l’intrigue. Rien n’existe en dehors de ses murs : l’alternance jour-nuit n’a pas lieu de cité, et le temps passé par les personnages hors du casino n’est
ni montré (hormis dans 2 courtes séquences) ni même évoqué. Sans que le mot ne soit jamais prononcé, tous sont bloqués là comme au purgatoire, voire en enfer à en croire l’ambiance qui règne. On
pense ainsi à Dante en découvrant l’organisation du lieu en cercles concentriques descendant jusqu’à la roulette, laquelle est encaissée en contrebas et semble aspirer les âmes aussi sûrement
qu’un trou noir aspire la lumière. D’improbables éclats visuels traversent ce décorum pour en décupler la démesure : le panier qui remonte depuis la roulette les richesses et bijoux gagés par les
joueurs malchanceux, le spectacle des femmes en cage mises au enchères qui apparaît soudain au travers d’une fenêtre.

 

Cette débauche – au propre comme au figuré – qui envahit l’écran et les personnages foule au sol toute possibilité de se raccrocher à la réalité. La citation placée en exergue par Von Sternberg
ne dit pas autre chose : « notre histoire n’a rien à voir avec le présent ». En effet, elle se place à un tout autre degré d’ambition, qui consiste à nous donner un aperçu
baroque et grandiose de l’enfer, sans effets spéciaux ni entité supérieure. Un enfer tristement et/ou magnifiquement humain en somme, où se mélangent orient et occident, masculin et féminin, bien
et mal, intelligence et pulsions.

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En aparté de cette critique, il est amusant de remarquer que l’obsession du cinéaste pour Marlene Dietrich (ils ont tourné 7 films ensemble) le pousse à intégrer à son récit toute une série de
substituts à l’actrice et aux rôles qu’elle a joués pour lui. Ressemblance physique pour Mother Gin Sling (Ona Munson), la propriétaire du casino ; ressemblance érotique pour Poppy (Gene Tierney)
qui se transforme peu à peu en incarnation de la perversion ; ressemblance morale enfin pour le Docteur Omar (Victor Mature), gigolo vivant aux crochets des autres et qui parvient toujours à se
sortir à peu de frais des situations périlleuses.

Une réponse à “The Shanghai gesture, de Josef Von Sternberg (USA, 1940)”

  1. Tietie007 dit :

    Mouais, pas trop convaincu par ce Shangai Gesture, même si j’ai toujours un grand plaisir à revoir Gene Tierney !