• Perfect mothers, de Anne Fontaine (France-Australie, 2013)

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Où ?

À l’UGC Danton

Quand ?

Samedi soir, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Depuis que Nettoyage à sec lui a ouvert la porte de cette rente de situation, Anne Fontaine entretient tranquillement sa carrière de chroniqueuse cinématographique des sujets « Sexo / Couple » tels que les traitent les magazines féminins à grand tirage. Ses films sont tout aussi vaguement sulfureux et subversifs que les témoignages qui remplissent les pages de ces parutions : « mon mari et moi avons couché avec notre jeune employé » (Nettoyage à sec), « j’ai embauché une prostituée pour qu’elle couche avec mon mari » (Nathalie…), etc. Perfect mothers sort la réalisatrice de la confidentialité de la publication française et lui donne l’opportunité d’œuvrer pour la prestigieuse édition internationale. Le sujet est de la même espèce (« moi et ma meilleure amie couchons chacune avec le fils post-adolescent de l’autre »), mais les noms claquent au générique – un roman du Prix Nobel Doris Lessing, adapté par le dramaturge Christopher Hampton (Les liaisons dangereuses, A dangerous method…), et aux héroïnes personnifiées à l’écran par Naomi Watts et Robin Wright.

Il y avait un film valable à faire sur cette histoire – le plan qui referme Perfect mothers l’atteste. Un film traitant sans retenue du désir sexuel, des pulsions irrésistibles qu’il provoque, des sacrifices de poids qu’il pousse à faire au nom du plaisir du moment, quoi qu’en disent la bienséance et la raison. Mais cet esprit n’habite que le seul dernier plan du long-métrage. C’est bien trop peu, bien trop tard, après 1h50 où ont régné sans interruption une platitude absolue et une affabilité consommée. Anne Fontaine s’installe douillettement dans l’olympe où évoluent ses personnages de riches oisifs, formant une élite somptueusement isolée et uniquement concernée par la permanence de son état. Ils habitent des palaces démesurés, mènent une vie professionnelle sans efforts, sont dotés de corps parfaits de vénus et d’apollons. Aucune aspérité, aucune gêne ne vient troubler le tableau, aussi lisse que le sont les visuels publicitaires, retouchés jusqu’à en ôter toute réalité, qui garnissent les magazines.

Dans cet univers immaculé, le trouble, le drame ont d’autant moins droit de cité que Fontaine se fond dans le décor. Elle épouse pleinement les manières de penser et de se comporter de ce microcosme aristocratique, ne sortant pas d’un rôle de chroniqueuse mondaine loyale. Tout coule de source, qu’il s’agisse de la plage paradisiaque dont l’usage est manifestement réservé aux héros, du fait d’hériter à vingt ans de l’entreprise de yachts de papa, du devoir de se marier et de faire des enfants avec la première fille que vous avez fréquentée plus d’un mois. Les vies des personnages sont fixées sur des tapis roulants, et filmées depuis le même endroit, sans recul ni décalage ; sans point de vue. Sans style, aussi, mais c’est là un mal mineur comparé au ratage de Perfect mothers sur la question du sexe. Chastes baisers, nudité fugitive, scènes d’amour éludées par des ellipses « convenables » bâillonnent le désir, traité comme un non-dit indécent qu’il faut rejeter dans l’obscurité des marges alors qu’il devrait se trouver au cœur du film. Lequel, ainsi amputé de sa raison d’être, n’a plus rien qui le protège du comique involontaire, à la manière de l’inénarrable reportage sur Arnaud Lagardère et sa tendre moitié.

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