• Mobile home, de François Pirot (Belgique, 2012)

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Où ?

Au Nouveau Latina

Quand ?

Mardi soir, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Coscénariste de Joachim Lafosse pour ses films précédant A perdre la raison, François Pirot se révèle plus doux et modeste que son ancien associé à l’occasion de son propre passage à la réalisation. Mobile home est ce que l’on appelle communément un « petit » film, appellation à laquelle on accole souvent l’expression « sans prétentions », avec tout ce que cela a de vaguement dédaigneux. Mobile home a des prétentions, simplement il les déploie dans un environnement matériellement réduit. Deux amis bientôt trentenaires, Simon et Julien, se sont retrouvés contraints par des aléas de la vie (rupture amoureuse pour l’un, longue maladie de son père pour l’autre) à revenir dans le village perdu dans la campagne où ils avaient grandi, puis qu’ils avaient quitté. Sur un éclair, de génie ou de folie, ils décident d’en repartir tous les deux, à bord d’un mobile home avec lequel ils sillonneront la planète.

Coupons court au suspense sans plus attendre : de pannes mécaniques en flirts durs à interrompre, Simon et Julien ne dépasseront physiquement pas la limite de la commune. Du point de vue du cinéma par contre, Pirot parvient à aller au-delà, de très belle manière. Ce qui frappe principalement est que Mobile home n’est nullement un de ces films de scénariste, qui reposent entièrement ou presque sur leur part écrite, mais bien l’œuvre d’un metteur en scène complet. En concevant un film verdoyant, vallonné, gorgé de soleil, Pirot déjoue habilement les clichés formels sur la représentation de la Belgique au cinéma et de ce fait rend universelle sa « petite » histoire. Bien sûr, celle-ci tire profit de sa qualité d’écriture, lorsqu’il s’agit d’éviter la répétition comique stérile dans laquelle un tel concept de road movie immobile aurait pu chuter. Mobile home s’attelle plutôt à donner vie à des personnages touchants et dignes d’intérêt, dont on sera tristes de se séparer au bout du chemin. Chose rare, et intelligente, leur adulescence notoire n’est pas vue comme une tare signe d’immaturité. C’est un poids qu’ils subissent, résultant de forces extérieures face auxquelles ils sont impuissants et éprouvés de l’être : d’une part les souvenirs heureux d’une enfance révolue, de l’autre la grisaille du monde des adultes qu’a à leur léguer la génération précédente. Entre l’assentiment et la dénégation, quelle attitude adopter, quelle réponse opposer ? Simon et Julien cherchent à le découvrir, au gré d’une succession de péripéties ordinaires où tout sonne toujours juste.

Mais l’écriture ne fait pas tout. Mobile home séduit tout autant par la qualité permanente de sa réalisation, avec des cadrages souvent inventifs sans se laisser aller au racolage oculaire. Jamais insignifiants, ils affermissent le propos, affinent la représentation des deux héros. La direction d’acteurs, excellente à tous les niveaux, mérite également sa part d’éloges. Pirot contient ceux pour qui c’est nécessaire (les vétérans Jackie Berroyer et Jean-Paul Bonnaire, volontiers cabotins et ici très sobres dans leurs compositions paternelles), élève celui de ses acteurs principaux qui en a besoin (Arthur Dupont, qui trouve là son premier rôle valable dans son premier film correct), et sait laisser le champ libre à l’autre, Guillaume Gouix, au talent immense. Sa palette est impressionnante, de même que l’aisance avec laquelle il passe d’une émotion à l’autre, tout en restant sans cesse dans le ton adéquat pour le moment présent, comme pour la vérité d’ensemble de son personnage.

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