• Maps to the stars, de David Cronenberg (USA-Canada, 2014)

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Où ?

Au Max Linder Panorama

Quand ?

Dimanche, à 15h30

Avec qui ?

MaBinôme

Et alors ?

Passé quelques jours après Maps to the stars dans la compétition cannoise, mais prévu pour sortir en salles bien plus tard (fin août), un autre film repose sur des éléments et fouille des thèmes similaires. Pour Sils Maria, Olivier Assayas a comme David Cronenberg imaginé un personnage d’actrice considérée par le milieu comme vieillissante (comprendre : quarantenaire), qui se retrouve face à une proposition de rôle actant ce deuil de la jeunesse, et est prise dans une relation ambiguë et tournant au vinaigre avec son assistante personnelle. Chez Assayas le duo est composé de Juliette Binoche et Kristen Stewart, dans Maps to the stars de Julianne Moore et Mia Wasikowska. Ces deux dernières évoluant à Hollywood plutôt que dans les Alpes suisses, et Cronenberg apportant à son film son penchant pour le surnaturel, une autre référence s’installe dans les parages : celle de Mulholland Drive. Et l’un des deux encombrants défauts de Maps to the stars est justement de rester au milieu du gué, goûtant à l’un et l’autre mais ne s’engageant ni vers le fantastique de Mulholland Drive ni vers la théâtralité de Sils Maria.

La mise en scène de David Cronenberg convoque pourtant les deux aspects, et de superbe manière. Le réalisateur a atteint un tel degré de maîtrise de son art qu’il se dégage de la plupart des séquences un trouble puissant, saisissant. Pour la première fois le cinéma de Cronenberg marche sur deux jambes : l’épure angoissante de sa dernière période (depuis A history of violence, voire Spider), et les dérèglements du réel à l’œuvre dans son âge d’or (La mouche, Faux-semblants, etc.). Les spectres macabres qui viennent hanter les protagonistes de Maps to the stars s’introduisent naturellement dans les prisons de vide que sont devenus les lieux de vie. De jour comme de nuit, en société comme en petit comité, Cronenberg disjoint méthodiquement les individus du monde qui les entoure. Il dévitalise leur environnement par ses cadrages, son montage, le vide qu’il installe dans la composition de ses plans. Et il rend ses personnages conscients de ce décollement, et donc vulnérables, des proies faciles pour la folie tragique ou meurtrière.

Bizarrement, et de façon très frustrante pour le spectateur, cette démonstration de force ne débouche sur rien. Si la théâtralité et le surnaturel prennent brillamment possession des lieux, leur occupation est stérile. Comme si le film se retrouvait lui-même piégé dans une bulle qu’il ne parvient pas à percer pour y faire entrer de l’air. Cela n’arrive qu’en de rares occasions, via le second rôle tenu par Robert Pattinson, chauffeur de limousine (clin d’œil très amusant au précédent film du duo Cronenberg-Pattinson, Cosmopolis, que l’acteur passait presque entièrement à l’arrière d’une limousine) qui traverse le récit sans y être véritablement impliqué. Lorsqu’il revient dans ce qui devrait être le vif de son sujet Maps to the stars patine, s’étiole ; jusqu’à s’achever en queue de poisson lors de son épilogue bâclé, qui saborde l’ensemble en forçant une conclusion fermée, obnubilée par la question de l’inceste. La manière dont ce thème écrase le film fait conjecturer que le film aurait pour morale qu’Hollywood est un lieu incestueux et laid, dans tous les sens des deux termes ; ce qui le rend pourri jusqu’à la moelle, avec pour seul horizon son autodestruction. C’est d’un nihilisme donneur de leçons, simpliste, et faux – cela fait plus d’un siècle que la Mecque du cinéma est incestueuse et laide, et elle se porte très bien, merci pour elle. Maps to the stars se manque, par manque d’ambiguïté ; dans ses personnages (ce que sait faire Sils Maria) ou bien dans son rapport au lieu qu’il filme (ce que sait magnifiquement faire Mulholland Drive).

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