• Le travestissement, dernière étape sur la voie de l’absolu (pour une série TV)

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A ma connaissance (mais je ne suis pas omniscient ; si vous voyez d’autres exemples, n’hésitez pas à le signaler dans les commentaires), ce qu’a réalisé la sitcom 30 Rock dans son avant-dernier épisode en date aux USA, le 5X17, est un tour de force n’ayant qu’un seul précédent dans l’histoire des séries TV. De son petit nom « Queen of Jordan », cet épisode est tout entier tourné comme s’il appartenait à un autre programme – lequel est factice, en plus (une fausse émission de téléréalité consacrée à l’un des personnages de la série), histoire d’achever de rendre les choses simples. L’unique autre cas d’une telle métamorphose qui me vient à l’esprit est celui de l’épisode des X-Files écrit et réalisé à la manière de l’émission – réelle, celle-là – Cops. Bien sûr, toutes les séries ne peuvent accommoder à leur cas particulier ce concept du crossover total, qui ne concerne pas seulement un ou plusieurs personnages mais carrément le show tout entier. On imagine mal un Lost ou un The wire se prêter à l’exercice… Ne pas le faire ne signifie donc aucunement qu’une série est imparfaite, mais la réciproque est par contre valable : une série qui tente le coup, et le réussit, gagne ses galons d’excellence.

Tenter et réussir vont de pair dans ce domaine, car il faut déjà avoir suffisamment de coffre et de savoir-faire pour ne serait-ce qu’oser se lancer à l’aventure. Pour 30 Rock, l’épisode Queen of Jordan est ainsi le point culminant – pour le moment – d’une montée en régime irrésistible au fil de la saison 5. Scénaristes et acteurs tiennent de mieux en mieux leurs personnages, et savent parfaitement quelle position et quelle importance leur donner au sein d’un script, pour maximiser son efficacité comique. Et une fois ses fondations maîtrisées les yeux fermés, la série se trouve en mesure d’élever à chaque fois un peu plus haut le niveau correspondant au « sommet de son art », en jouant sur les deux leviers que sont la manipulation de sa forme et l’ambition des sujets abordés. Entre ses saisons 4 et 7, X-Files se trouvait dans cet état de grâce et de là pouvait s’autoriser toutes les folies pour bousculer ses limites – invitation d’auteurs extérieurs, épisodes auto-parodiques, le pastiche de Cops. 30 Rock entre à son tour dans cette sphère, et ses histoires partent dans toutes les directions sauf celle correspondant à son cap initial, fixé il y a cinq ans de cela (les relations au sein d’une équipe de la chaîne NBC en charge d’une émission hebdomadaire de sketches). Dans le 5X07, « Brooklyn without limits », le feu nourri de la série se porte en parallèle sur les Golden Globes et le Tea Party. Le 5X11, « Mrs. Donaghy », envisage un mariage « par erreur » entre les deux personnages principaux, Liz Lemon / Tina Fey et Jack Donaghy / Alec Baldwin1, qui sert d’étincelle à un prodigieux feu d’artifice de gags et de sales coups. Le 5X14, « Double-edged sword », en est en quelque sorte le miroir en plaçant Liz et Jack dans une situation de crise vis-à-vis de leur véritable compagnon respectif, avec pour prétexte la tempête de neige monstre qui a frappé les USA en fin d’année dernière. Un avion – piloté par Matt Damon – qui ne décolle pas pour l’une, un accouchement forcé au Canada (pays où « l’on ne veut pas de notre argent » dans les hôpitaux) pour l’autre ; là encore, au bout du compte, le jackpot.

Et donc, il y a dix jours, Queen of Jordan, sa copie conforme des codes et manipulations de la téléréalité dans la seule fin de les railler, et au-delà du dispositif ses blagues toujours plus borderline. Lesquelles font de 30 Rock un rival sérieux de The office dans le genre : l’adresse de site web Jennas-side.com (à lire à voix haute) et le monologue de Jack qui prend Hitler en exemple de victime d’une campagne de dénigrement médiatique dans l’opinion (« It happened to Hitler. No one ever talks about his paintings ») définissent un nouveau palier de ce que la série ose proférer. Je vous laisse, je vais sans attendre voir ce que le 5X18 nous réserve.

1 s’il ne fallait citer qu’une raison rendant obligatoire le visionnage de 30 Rock, ce serait lui : Alec Baldwin, qui se révèle être un acteur comique de génie dans ce rôle de haut dirigeant issu de l’aristocratie WASP et républicaine

A ma connaissance (mais je ne suis pas omniscient ; si vous voyez d’autres exemples, n’hésitez pas à le signaler dans les commentaires), ce qu’a réalisé la sitcom 30 Rock dans son avant-dernier épisode en date aux USA, le 5X17, est un tour de force n’ayant qu’un seul précédent dans l’histoire des séries TV. De son petit nom « Queen of Jordan », cet épisode est tout entier tourné comme s’il appartenait à un autre programme – lequel est factice, en plus (une fausse émission de téléréalité consacrée à l’un des personnages de la série), histoire d’achever de rendre les choses simples. L’unique autre cas d’une telle métamorphose qui me vient à l’esprit est celui de l’épisode des X-Files écrit et réalisé à la manière de l’émission – réelle, celle-là – Cops. Bien sûr, toutes les séries ne peuvent accommoder à leur cas particulier ce concept du crossover total, qui ne concerne pas seulement un ou plusieurs personnages mais carrément le show tout entier. On imagine mal un Lost ou un The wire se prêter à l’exercice… Ne pas le faire ne signifie donc aucunement qu’une série est imparfaite, mais la réciproque est par contre valable : une série qui tente le coup, et le réussit, gagne ses galons d’excellence.

Tenter et réussir vont de pair dans ce domaine, car il faut déjà avoir suffisamment de coffre et de savoir-faire pour ne serait-ce qu’oser se lancer à l’aventure. Pour 30 Rock, l’épisode Queen of Jordan est ainsi le point culminant – pour le moment – d’une montée en régime irrésistible au fil de la saison 5. Scénaristes et acteurs tiennent de mieux en mieux leurs personnages, et savent parfaitement quelle position et quelle importance leur donner au sein d’un script, pour maximiser son efficacité comique. Et une fois ses fondations maîtrisées les yeux fermés, la série se trouve en mesure d’élever à chaque fois un peu plus haut le niveau correspondant au « sommet de son art », en jouant sur les deux leviers que sont la manipulation de sa forme et l’ambition des sujets abordés. Entre ses saisons 4 et 7, X-Files se trouvait dans cet état de grâce et de là pouvait s’autoriser toutes les folies pour bousculer ses limites – invitation d’auteurs extérieurs, épisodes auto-parodiques, le pastiche de Cops. 30 Rock entre à son tour dans cette sphère, et ses histoires partent dans toutes les directions sauf celle correspondant à son cap initial, fixé il y a cinq ans de cela (les relations au sein d’une équipe de la chaîne NBC en charge d’une émission hebdomadaire de sketches). Dans le 5X07, « Brooklyn without limits », le feu nourri de la série se porte en parallèle sur les Golden Globes et le Tea Party. Le 5X11, « Mrs. Donaghy », envisage un mariage « par erreur » entre les deux personnages principaux, Liz Lemon / Tina Fey et Jack Donaghy / Alec Baldwin1, qui sert d’étincelle à un prodigieux feu d’artifice de gags et de sales coups. Le 5X14, « Double-edged sword », en est en quelque sorte le miroir en plaçant Liz et Jack dans une situation de crise vis-à-vis de leur véritable compagnon respectif, avec pour prétexte la tempête de neige monstre qui a frappé les USA en fin d’année dernière. Un avion – piloté par Matt Damon – qui ne décolle pas pour l’une, un accouchement forcé au Canada (pays où « l’on ne veut pas de notre argent » dans les hôpitaux) pour l’autre ; là encore, au bout du compte, le jackpot.

Et donc, il y a dix jours, Queen of Jordan, sa copie conforme des codes et manipulations de la téléréalité dans la seule fin de les railler, et au-delà du dispositif ses blagues toujours plus borderline. Lesquelles font de 30 Rock un rival sérieux de The office dans le genre : l’adresse de site web Jennas-side.com (à lire à voix haute) et le monologue de Jack qui prend Hitler en exemple de victime d’une campagne de dénigrement médiatique dans l’opinion (« It happened to Hitler. No one ever talks about his paintings ») définissent un nouveau palier de ce que la série ose proférer. Je vous laisse, je vais sans attendre voir ce que le 5X18 nous réserve.

1 s’il ne fallait citer qu’une raison rendant obligatoire le visionnage de 30 Rock, ce serait lui : Alec Baldwin, qui se révèle être un acteur comique de génie dans ce rôle de haut dirigeant issu de l’aristocratie WASP et républicaine

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