• Cherchez Hortense, de Pascal Bonitzer (France, 2012)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Vendredi soir, à 21h

Avec qui ?

MaBinôme

Et alors ?

Cherchez Hortense est un film qui n’a pas trouvé comment bien se vendre. Son affiche triste, sa bande-annonce empruntée, et jusqu’à son titre semblant être le fruit d’un choix par défaut cachent une œuvre d’une grande finesse, et particulièrement plaisante à suivre. Pascal Bonitzer, scénariste surtout pour les autres (Rivette, Ruiz, etc., depuis trente-cinq ans) et un peu pour lui-même – c’est son sixième film comme réalisateur – tisse autour de son personnage principal, Damien / Jean-Pierre Bacri, une toile habile et riche, faite d’amis et de membres de la famille, d’embarras et d’accidents. Le résultat est une comédie, mais dont les fils directeurs sont l’angoisse et le malheur. Tout ce que Damien va trouver sur son chemin durant les quelques jours que dure le récit le tire vers le bas. Son couple se défait, un de ses amis développe des tendances suicidaires, son père s’avère de plus en plus méprisant et inaccessible à mesure qu’il vieillit… et, pour couronner le tout, il se retrouve investi d’une mission aussi délicate que considérable, faire jouer ses relations (surestimées par son entourage) pour éviter qu’une sans-papier se fasse expulser.

Bonitzer couche sur le papier les éléments d’un drame, puis les relie en prenant sans cesse la tangente. Dans la veine d’un Woody Allen, il s’arrange pour regarder le tragique de la vie sous un angle qui le rend subtilement absurde. De cette façon le rire évince les larmes, et rend supportables les épreuves de l’existence de même que son étouffant caractère machinal. Les journées de Damien commencent toutes de la même manière (un plan serré en plongée sur sa tête enfoncée dans l’oreiller et sa main qui cherche à l’aveugle la personne à ses côtés dans le lit), puis se déroulent dans un périmètre et un nombre de lieux restreints à l’intérieur de la grande ville. Bonitzer filme une vie de village au milieu de Paris – comme Allen dans son Manhattan –, une vie réaliste du coup, avec son confort apparent et son désenchantement toujours présent, en filigrane. Les sketches burlesques agissent comme un antidote, basé sur un comique de situations et de quiproquos, qu’il est nécessaire d’administrer à une fréquence soutenue pour contenir le mal-être. Bacri fait un patient exemplaire, les seconds rôles qui l’entourent sont des visiteurs dévoués dont la présence enrichit les scènes, et Bonitzer un aide-soignant de talent, qui manie comme il le faut l’humour de cinéma. Le découpage des plans, le tempo et le tranchant des répliques sont toujours les bons, assurant l’effet positif des piqûres d’absurde.

Cette réussite est ternie par l’imprévu et décevant virage pris par Cherchez Hortense dans son épilogue. A rebours de la position amèrement drôle qu’il maintenait jusque là, Bonitzer se met soudain en quête d’un authentique happy end, et s’engage pour cela dans la voie de la comédie romantique. Mais ce qu’il met alors en place est laborieux, plat, et ne peut passer outre sa nature factice – un film ayant regardé en face la déprime de l’existence pendant une heure et demie, et chaussant soudain des lunettes à verres fumés pour tout voir en rose, est si peu crédible qu’il semble avant tout chercher à se tromper soi-même. On préférera oublier ce dérapage et garder en mémoire la lucidité spirituelle dont Cherchez Hortense fait si longtemps preuve.

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