• Cannes, 20 mai : la queue vers nulle part

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Journée d’horreur, avec trois files d’attente d’une heure et demie chacune pour se faire refouler à la fin. À la Quinzaine, j’ai visiblement sous-estimé la taille du fan-club de Guillaume Gallienne, qui présentait son premier long-métrage comme réalisateur, Les garçons et Guillaume, à table !. À la Sélection Officielle, pour la deuxième fois en autant d’essais personne de la queue dernière minute n’est entré au Grand Théâtre Lumière, pour la projection d’Un château en Italie. Il y a visiblement beaucoup plus (beaucoup trop) d’accrédités cette année… Enfin, à la petite ACID, les organisateurs ont eu la lumineuse idée de penser la présentation de La bataille de Solférino comme une séance « réservée aux exploitants » (quitte à aller chercher ceux-ci dans la rue une fois la queue vidée), tout en laissant se former une file pour les autres spectateurs, qui n’avaient pourtant pas le début d’une chance d’entrer.

Je suis quand même parvenu à sauver l’essentiel, en voyant deux films dont un bon – Omar, drame juste et dur prenant place en Cisjordanie et montré à Un Certain Regard. Dans son scénario, l’auteur Hany Abu-Assad compose une riche mosaïque amoureuse et politique. Les héros, unis par leur lutte pour la cause nationale, sont sans le savoir séparés par leurs aspirations sentimentales incompatibles – deux des trois garçons sont amoureux de la même fille, sœur du troisième. L’harmonie de leur quatuor est fragile, et l’engrenage des trahisons volontaires ou contraintes l’érodera jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien. Classique dans le bon sens du terme, le récit est extrêmement glaçant dans le fatalisme de sa faillite. La belle tenue de la réalisation d’Hany Abu-Assad assure la force du film. Vif dans l’action (les escarmouches et poursuites avec les soldats israéliens), sensuel dans le désir tant qu’il peut exister, Omar frappe surtout par sa sécheresse. Vecteur de l’inéluctable, elle est nourrie par les ellipses cassantes du montage, au sein des séquences ou pour provoquer leur terme. Elles brusquent les drames, ferment tout espoir de leur échapper dans cette belle variante palestinienne, le temps d’un film, de Homeland – ou Hatufim, au vu de la proximité géographique.

Et le soir, à la Quinzaine, une bizarrerie dans un tel festival : de la science-fiction mâtinée d’horreur. Problème, The last days on Mars est de la mauvaise science-fiction mâtinée d’horreur. Le réalisateur Ruairi Robinson signe là un premier film en forme de carte de visite, qui n’a rien d’autre à vendre que son savoir-faire de technicien de genre. Exclusivement obnubilé par la vitesse et l’efficacité d’exécution, il oublie d’écrire des protagonistes et de bâtir un suspense. The last days on Mars se résume du coup à une suite de péripéties montée à la chaîne, un ride certes rapide mais dénué de toute contenance. Dans lequel les personnages humains ont aussi peu de caractère, d’histoire, bref de vie, que les infectés devenus zombies qu’ils se retrouvent à combattre. C’est embarrassant (au bas mot), tout comme le fait de devoir attendre le dernier quart d’heure pour voir deux personnages dialoguer vraiment, et le dénouement qui tente fort maladroitement de se rattacher aux références supérieures que sont Alien et The thing. Alors que le véritable horizon de la série Z de Robinson est une parabole sur l’ère moderne du smartphone : les héros y sont en permanence en rade de batterie ou de réseau.

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