• Le bon, la brute et le cinglé, de Kim Jee-Won (Corée du Sud, 2008)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles, dans une assez grande salle

Quand ?

Mercredi jour de la sortie, à 22h

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Le titre du film n’est pas qu’un clin d’œil de façade : Le bon, la brute et le cinglé est principalement mû par le désir de reproduire les motifs les plus marquants du film
quasi-homonyme de Sergio Leone. Seul le lieu de l’action est réellement chamboulé, passant du Far West américain au désert de Mandchourie. Les autres ajustements sont mineurs, qu’ils concernent
l’époque (toujours le début du 20è siècle, ici agrémenté de quelques anachronismes) ou les personnages – le passage d’un « ugly » à un « weird » pour
accompagner le good et le bad rend ce 3è larron plus comique en surface, mais ne le modifie pas profondément dans sa substance.


De la substance, voilà justement ce qui manque cruellement au film de Kim Jee-Won. Contrairement au superbe 2 sœurs qui l’avait fait connaître en France, et à l’instar de son
dernier long-métrage en date A bittersweet life (un début de mauvaise pente, donc), Le bon, la brute et le cinglé est une longue suite de gesticulations de pure
forme et ne conduisant nulle part, n’ouvrant sur aucune émotion palpable, aucun personnage avec un tant soit peu de chair. Au passage, le gouffre entre Kim Jee-Won et Tarantino – auquel le coréen
cherche désespérément à ressembler, ici par un clin d’œil, là par la réutilisation d’un technique – s’ouvre précisément sur ce terrain : Tarantino se fait toujours un devoir de nous mener
quelque part avec ses films, même si c’est le plus souvent par des chemins de traverse.


Dans A bittersweet life et Le bon, la brute et le cinglé, Kim Jee-Won ressemble à un gamin face à une immense caisse de jouets – une sorte d’alter-ego coréen de
Michael Bay. Il recrache à l’écran codes de genre et motifs mal digérés, dans une esbroufe formelle tout ce qu’il y a de plus stérile. La longue séquence de triple attaque d’un train (le cinglé
pour braquer tous les passagers sans distinction, la brute pour récupérer un item précis et le bon pour arrêter la brute) qui ouvre le récit fait encore illusion ; après tout, quel meilleur
moyen d’ouvrir un film de genre que par le biais d’une scène d’action grandiloquente, où les balles fusent dans tous les sens tandis que la caméra se fraye un chemin acrobatique à travers les
wagons ? Mais il faut ensuite savoir passer à autre chose, ce dont Kim Jee-Won est incapable. Le reste du film tourne en rond, de fusillades gratuites – et sans réelle inspiration visuelle -
en discussions lénifiantes – et sans inspiration langagière.


Une seule séquence sort du lot : la course-poursuite démesurée qui ouvre le dernier acte, mettant aux prises à pleine vitesse dans une étendue désertique sans fin le cinglé en side-car, le
bon à cheval, la brute accompagnée de tout son gang… et un plein régiment de l’armée japonaise. La démultiplication des confrontations, coups tordus et autres renversements de situation
parvient enfin à rapprocher le film de son ambition cartoonesque. Mais ce ravissement ne dure qu’un temps, et Le bon, la brute et le cinglé a tôt fait de s’enliser de plus belle.
Et, à deux séquences près, il n’est finalement qu’un avatar de plus du mauvais génie du cinéma coréen contemporain, qui s’échine à recopier les pires travers et poncifs du tout-venant
hollywoodien. Un chemin dorénavant suivi par de plus en plus de réalisateurs français ramollis par les budgets de nouveaux riches offerts par leurs producteurs…

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