• La fille de Monaco, de Anne Fontaine (France, 2008)

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Où ?

Au MK2 Quai de Seine, dans l’une des 2 grandes salles

Quand ?

Jeudi soir, à la séance de 22h

Avec qui ?

Ma femme, tout juste rentrée de vacances et déjà dans une salle obscure avec moi

Et alors ?

La fille de Monaco est une Gilda moderne (ça tombe bien, il y a justement une critique de Gilda ici). Pour le personnage, cela signifie remplacer le strip-tease lascif
des gants de Rita Hayworth par le susurrement de mots très crus – et audibles par le spectateur – à l’oreille de sa cible masculine. Pour le film, il s’agit de reprendre du classique de Charles
Vidor le décor artificiel – la principauté de Monaco remplaçant le simple casino d’antan – et surtout le triangle amoureux sulfureux et antagoniste, constitué de 2 hommes liés par une relation de
travail ainsi que par une homosexualité latente, et d’une jeune femme venant bousculer cet état de fait par sa sensualité et son imprévisibilité.

Gilda a atteint le rang de chef-d’œuvre pour sa mise en scène remarquable, qui repousse les limites de l’expressionnisme du film noir, et pour la force des discours féministe et
sur les oppositions sociales qu’il tire de la lutte entre ses personnages. La fille de Monaco est loin d’avoir de telles ambitions ou de tels aboutissements (surtout en ce
qui concerne sa réalisation, complètement utilitaire) ; mais il se maintient tout de même au-dessus de la ligne de flottaison des films français, sûrement grâce à son inscription dans le canevas
typiquement américain du film noir. C’est ainsi que, même s’il aurait mérité d’être plus abouti, le scénario opère un joli glissement de la comédie des premières scènes vers le tragique des
dernières, toujours à partir des mêmes ingrédients de départ. Sur les personnages et leur interprétation, le bilan est là encore globalement positif : l’avocat de Luchini (qui s’en tire tout
de même très bien) a beau être en retrait car restant assez flou dans ses intentions et ses fondements, les 2 autres pointes du triangle proposent un mélange convaincant d’écriture fouillée et
d’interprétation stimulante – Roschdy Zem est comme à son habitude parfait, et Louise Bourgoin, la Miss Météo délurée de Canal +, une débutante très douée.

Pourtant, leurs rôles à tous les 2, un garde du corps et une… miss météo, arriviste et foncièrement creuse, n’ont a priori que peu d’assise cinématographique. C’est là la plus belle prouesse de
La fille de Monaco que de leur donner justement cette assise, cette force, en s’attardant sur leur quotidien quelconque (la routine, l’ameublement Ikea) et surtout sur la
stupidité abyssale du personnage féminin. Rarement le tsunami dévastateur que représente le flot de paroles ininterrompu et vide de sens d’une telle personne – féminine ou masculine – aura été
aussi bien montré à l’écran que dans la scène où Luchini pense réussir à rompre avec elle. C’est grâce à cette belle qualité d’écriture que le film peut se conclure sur un final réussi, en forme
d’allégorie sociale où donneurs d’ordres, exécutants et victimes sont chacun dans leur rôle… jusqu’à ce que le désir sexuel vienne bouleverser ce qui semblait écrit.

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