• In the loop – bis

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loop-4.jpgOù ?

A la maison, en DVD zone 2 édité par CTV International, et obtenu via Cinetrafic dans le cadre de leur opération « DVDtrafic »

Quand ?

Lundi soir

Avec qui ?

MaFemme

Et alors ?

 

Une insolence effrontée portée en bandoulière et une atmosphère de chaos généralisé et foncièrement instable sont-elles des outils pertinents pour traiter d’un sujet aussi sérieux que le
déclenchement de la deuxième guerre américaine en Irak ? Oui, cent fois oui, à voir ce que In the loop fait du mélange entre cette forme et ce fond que tout oppose
en apparence. De telles apparences sont aujourd’hui foncièrement trompeuses, la gravité théorique du concept de conflit armé d’ampleur internationale ayant été ruinée par la personnalité et les
arguments des meneurs de cette première guerre majeure du 21è siècle. C’est au second assaillant que s’en prend In the loop, en imaginant un engrenage infernal de faits,
déclarations, luttes d’egos et coups fumeux ayant pu mener à une arnaque aussi massive que le rapport bidonné présenté par le Royaume-Uni devant l’Assemblée Générale de l’ONU pour appuyer la
déclaration de guerre à l’Irak. Tout ceci est aussi fictif que l’escalade élaborée par Kubrick dans Docteur Folamour ; mais est également tout aussi crédible, voire
même plus puisque dans le cas présent le point final du récit a effectivement été atteint dans le monde réel.

 

In the loop démarre alors que Simon Foster, le ministre britannique du « développement mondial » déclare à la radio que pour lui la guerre évoquée est
« imprévisible ». Il n’en a pas conscience, mais il vient de mettre les deux pieds dans le plat des hauts fonctionnaires anglais et américains favorables à une telle guerre et
qui comptaient bien continuer à avancer leurs pions dans l’ombre. A son insu, Foster va donc être récupéré et manipulé par le camp belliqueux, tout comme le seront dans la foulée les différents
sous-fifres et assistants auteurs de bourdes similaires. Cela, nous-mêmes ne le comprendrons qu’après la séance, en repensant au film à tête reposée… Car les 1h35 que dure In the
loop
sont une plongée en apnée dans un tourbillon de dialogues comiques et caustiques, qui détournent notre attention des faits et gestes d’importance. L’accumulation effrénée de
blagues au sein de chaque plan et de chaque échange verbal, qui est à la base du scénario, est un brillant outil de satire ; il est en effet impossible que l’intégralité des protagonistes
possèdent un sens de la répartie aussi aigu et un humour aussi féroce.

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La mécanique comique du film repose principalement sur l’exagération du fossé psychologique qui sépare les va-t-en-guerre et les tenants d’une solution diplomatique ; comme si les
personnages de chaque camp avaient été écrits par un membre de la faction adverse. Les premiers sont des brutes hystériques et nerveuses, vulgaires dans leurs paroles et violentes dans leurs
actes. Les seconds sont des lavettes à l’orgueil inexistant ou ravalé depuis longtemps, qui lancent leurs propres piques en marmonnant et se font physiquement tout petits : yeux baissés,
tête rentrée dans les épaules. Appuyée par un vrai talent d’utilisation des décors à des fins comiques – chambre d’hôtel, bureaux vitrés… – et des accessoires qui les garnissent (par exemple des
jouets d’enfant dans une séquence de réunion officieuse hilarante), cette pratique de la caricature atteint un niveau jouissif précisément car elle est poussée à son paroxysme. Aucun compromis
n’est possible entre ces deux groupes qui ne ressentent pour l’autre que détestation et mépris, et se le font savoir dès que possible. Les railleries et insultes s’amoncellent dans des monologues
déroulés jusqu’à l’absurde (« You’re lobsterizing ! »), quand ce ne sont pas les machines à fax qui prennent pour l’exemple en étant explosées en mille morceaux.

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Dans son dernier tiers, la manière dont In the loop parvient sans rien sacrifier de son outrance burlesque à se réorienter sur les rails d’un récit fondamentalement
sérieux (la confection du faux rapport) est absolument brillante. L’humour des répliques et des situations prend un tour franchement caustique alors que se concrétise la débâcle des pacifistes,
incapables de se mettre en travers du plan pourtant pas franchement éblouissant de leurs rivaux. Et tandis que le récit met un dernier coup d’accélérateur pour décrire des événements échappant
définitivement à toute prise (avec comme point d’orgue une déclaration de guerre votée sans que l’on s’en rende compte ou presque), de la satire émergent des vérités humaines cinglantes. Le
processus qui a mené à l’offensive militaire reste largement opaque ; mais l’arrivisme à courte vue, le machisme bas de plafond, la lâcheté molle des uns ou des autres sont on ne peut plus
limpides.

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Le premier contact avec les suppléments du DVD ne paye vraiment pas de mine. A voir surgir en tout et pour tout une simple enfilade de courtes interviews des acteurs, des scénaristes et du
réalisateur, filmées de manière très laide qui plus est, on ne se sent pas vraiment récompensés de l’épreuve (des menus qui nous hurlent à la figure des extraits de dialogues en VF) que l’on a dû
franchir pour les atteindre. La tendance s’inverse avec le contenu de ces entretiens, grâce à l’intelligence des gens impliqués dans le film – logique, celui-ci brillant également par son
intelligence. Tous se rejoignent sur un point cardinal, qui est la fragilité de tout édifice comique ; et sur la réponse à apporter à cela, qui consiste à exploiter au maximum et simultanément
toutes les ressources à disposition dans l’équipe. Cela aboutit à un travail de va-et-vient constant entre les scénaristes (au pluriel, nécessairement, pour obtenir la densité de matériau
permettant de remplir quatre-vingt-dix minutes de film sans trou d’air) et les comédiens, encouragés à prendre possession du texte à chaque étape de la production. Le film devient ainsi en partie
improvisé, mais à partir d’une base suffisamment solide pour laisser toujours la solution de ne pas improviser et d’être quand même drôle. Le processus se fait sous l’observation et la direction
du réalisateur, Armando Iannucci, lequel se révèle dans sa propre interview être un poil à gratter politique dans ce que le rôle peut avoir de constructif et de perspicace, pas simplement de
parasite : les dysfonctionnements imperceptibles du système (comme le fait d’attribuer des postes à forte responsabilité à des jeunes de 22-23 tout juste diplômés) l’intéressent plus que les
pseudo-scandales enflés par les media sur la base de déclarations ambiguës qu’ils ont eux-mêmes provoqués.

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A noter également, la présence d’un livret papier très drôle, qui détourne avec beaucoup d’inspiration les canons du dossier de presse selon l’esprit du film.

 

In The Loop 

Un film de Armando Iannucci avec Peter Capaldi et
Tom Hollander. 

Distribution : CTV International

Fiche Produit CTV

Date de sortie : 18/05/2010

http://www.cinetrafic.fr/film/23350/in-the-loop

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