• Glastonbury, de Julian Temple (Angleterre, 2006)

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Où ?

Au Max Linder, qui offre une qualité de son dantesque pour ce genre de documentaire rock

Quand ?
Hier soir
Avec qui ?
Ma chérie
Et alors… ?

Je parlais dans une chronique précédente (à propos du documentaire Gimme
shelter
) de la mort symbolique du rock en 1969. Le film vu hier soir est un beau démenti à cette assertion, en racontant une épopée née justement en 1970, sur les décombres de
l’utopie de Woodstock et d’Altamont, et qui se poursuit aujourd’hui, plus fringante que jamais : le festival de Glastonbury.

 

Fidèle à l’esprit de celui-ci, le film est sans doute le plus bordélique présenté en salles cette année. Le réalisateur Julian Temple accumule sans distinction images de professionnels
(captations des concerts, interviews et reportages TV couvrant les 35 années d’existence du festival) et d’amateurs – les fonctions nuit des caméras DV et l’attrait pour l’insolite de leurs
possesseurs font alors des merveilles – pour faire jaillir l’âme de ce qui est bien plus qu’un enchaînement de concerts aux têtes d’affiche prestigieuses. Les extraits de chansons de Björk, Nick
Cave, Blur et autres Chemical Brothers sont en permanence mis en relation avec des images de tous âges et de toutes provenances, pour aboutir à des clips à thème illustrant les aspects les plus
remarquables de l’événement : la vie nocturne, les drogues, la boue, le toujours délicat problème des toilettes… Mais surtout l’étonnante vitalité citoyenne et politique qui resurgit chaque année
dans le cadre du festival.

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Pendant 4 jours, ceux qui viennent à Glastonbury coupent tous les ponts avec le reste du monde pour créer une société éphémère où l’anarchie et la tolérance fonctionnent. Comme le rappelle la
chronologie du festival faite par son créateur Michael Eavis et qui sert de fil rouge au film, le festival s’est toujours nourri de la cohabitation entre les différents publics que sont les
couples avec enfants, les employés modèles qui trouvent là une soupape à l’inintérêt de leurs vies, et les marginaux (hippies des années 70, travelers itinérants persécutés par la
politique thatchérienne…) que les catégories précédentes regardent d’un oeil noir quand ils les croisent des les rues de Londres. Ce mélange semble être le meilleur terreau pour l’engagement
politique. Les immenses banderoles Oxfam et Greenpeace qui ornent la scène, les
déclarations polémiques des chanteurs et surtout la libre expression qui règne dans les allées tranchent avec la neutralité hypocrite du capitalisme moderne, et donnent à Glastonbury une place de
poil à gratter citoyen qui explique son importance pour ceux qui en sont – et la peur de ceux qui ne veulent pas en être. A ce titre, la clôture installée en 2002 ne semble pas tant être là pour
empêcher les gens de rentrer, que pour tenter de maintenir sous contrôle les idées et pratiques « dangereuses » qui se développent à l’intérieur des murs…

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Avec une emphase certaine mais légitime au vu des images, Temple utilise les 2 seuls moments où il se fend d’1 voix-off pour relier ce qui se passe depuis 35 ans à Glastonbury avec la grande
Histoire, celle de la légende du Saint Graal enterré à quelques encablures et des poèmes de Byron appelant avec lyrisme à la fondation sur ces terres d’une nouvelle Jérusalem révélant ce que
chacun a de mieux à offrir. La première évocation du poème, en ouverture du film, fait sourire ; lorsque Temple y revient après ces 2 heures d’immersion intense, on y réfléchit plus sérieusement.
Car devant nos yeux a pris forme un monde où le rock transcende son statut commercial et ses divisions en chapelles pour devenir une force vitale puissante, comme l’exprime la double conclusion
articulée autour des 2 morceaux d’anthologie que sont Common people de Pulp et Heroes de Bowie.

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