• Frozen river, de Courtney Hunt (USA, 2008)

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Où ?

Au MK2 Quai de Seine, dans la grande salle

Quand ?

Samedi soir

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

Le cinéma indépendant américain, porté aux nues depuis le milieu des années 90 dans le sillage des fers de lance Quentin Tarantino et les frères Coen, serait-il en train de s’ankyloser, et de se
pelotonner paresseusement dans la répétition stérile des poses qui ont fait sa gloire ? Après The visitor, Grand Prix à Deauville il y a quelques mois, Frozen
river
(Grand Prix à Sundance, la Mecque du ciné indie US, cette fois) confirme la tendance. La réalisatrice Courtney Hunt se donne pourtant des atouts non négligeables sur
lesquels construire un film solide : un lieu hautement cinégénique, sous la forme d’un lac gelé traversant la frontière entre les USA et le Canada ; un duo de personnages principaux dont
l’hétérogénéité (une mère de famille abandonnée par son mari et qui se débat pour joindre les deux bouts, et une jeune Mohawk revêche qui profite du statut spécial de la réserve où elle vit pour
faire du trafic transfrontalier) peut provoquer des étincelles ; et enfin, un thème complexe et d’actualité, celui de l’immigration clandestine – tiens, le même que dans The
visitor
.


Mais voilà, autant le petit personnel du sanctuaire hollywoodien prend un plaisir de plus en plus marqué à ruer dans les fondements de l’identité américaine (via les comédies déjantées des gangs Apatow, Ferrell ou Stiller particulièrement),
autant les œuvres dites indépendantes apparaissent comme de plus en plus enclines à reproduire des clichés rebattus. Cela se ressent surtout dans l’écriture des personnages qui, des ados rebelles
aux flics compréhensifs et aux jeunes enfants innocents, sont plus des énièmes variations de figures vues et revues que des êtres dotés de chair et de sentiments complexes. Le traitement du fond
se révèle moins décevant que problématique ; Courtney Hunt traite les choses de la manière la plus factuelle qui soit, sans jamais s’attaquer à la problématique morale qui était si brillamment
mise au centre du Silence de Lorna il y a
quelques mois, sur un thème similaire. Plus gênant, comme si elle avait peur d’être cataloguée « à gauche », elle tombe dans l’excès inverse en faisant de son héroïne une femme
antipathique, dénuée de compassion – et qui ne change pas de caractère, hormis pour permettre à la réalisatrice de bricoler un semi happy-end qui sonne faux. La déception est don inévitablement
au rendez-vous, malgré les achèvements réels du film en termes de mise en scène (très belles visions diurnes et nocturnes de ce paysage figé dans la neige) et de scénario (les péripéties
successives, beaucoup moins téléphonées que les personnages, sont toutes saisissantes).


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