• Éloge de l’inadaptation : Les vacances de M. Hulot, de Jacques Tati (France, 1953)

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Où ?

Au Max Linder, une des salles dans lesquelles le film est sorti dans une version restaurée de toute beauté. Malheureusement, les impératifs et le rythme frénétique du cinéma commercial étant ce
qu’ils sont, Les vacances de M. Hulot ne sont restées qu’une seule semaine à l’affiche du Max Linder, délogées dès ce mercredi par Public enemies et son tournage en numérique parfaitement
adapté aux capacités de projection à la pointe du cinéma

 

Quand ?

Lundi soir, après une crêperie express

 

Avec qui ?

Ma femme et une amie cinéphile

 

Et alors ?

 

Un été pendant les années 1950, des milliers de français partent en vacances au bord de la mer. Parmi eux, une poignée choisit comme destination une petite station balnéaire de Bretagne, et son
bien nommé « Hôtel de la Plage » qui leur permet d’être quasiment les pieds dans l’eau. Là, ils vont croiser la route de M. Hulot qui, pour sa première apparition (suivront Mon
oncle
, Playtime et Trafic) comme avatar de Jacques Tati, interprété par le cinéaste lui-même, fait l’étalage de sa capacité immense à générer malgré lui
le chaos partout où il passe. M. Hulot est le grain de sable dans le grand engrenage humain qu’est la société occidentale moderne, de l’après-guerre. Par le biais de son personnage, et à sa
manière quasi-muette et d’une exceptionnelle minutie dans l’édification des gags, Tati invente Les dents de la mer avec un canoë cassé en deux, détraque le déroulement d’un
enterrement, transforme un bruit de moteur agonisant en coup de pistolet, déclenche un feu d’artifice géant, accomplit un gag de cinéma prodigieux (un pot de peinture qui va et vient avec les
vagues, en plan-séquence)… et bien d’autres choses encore dont, dans la séquence la plus mémorable du film, une réinvention de la pratique du tennis.

 

 

Après chacune de ses prouesses perturbatrices, M. Hulot trouve le moyen de se réfugier discrètement dans sa chambre meublée sous les toits. De là, il peut observer l’agacement que sa conduite
décalée provoque au sein de la majorité disciplinée et apathique, qui est incapable de considérer les vacances comme autre chose qu’une prolongation de la routine quotidienne du
métro-boulot-dodo. Si les gags déclenchés par M. Hulot sont hilarants, ceux qui s’attachent à l’observation des mœurs de ses concitoyens sont du genre grinçant : obéissance au doigt et à
l’œil aux consignes (qu’il s’agisse de gymnastique ou des heures de repas) et bougonnements appuyés contre les « écarts » de conduite (musique jouée trop forte, initiatives du genre bal
masqué) sont les deux principales lignes de conduite de ce troupeau informe. Jamais mal attentionné, mais simplement maladroit et insensible au formatage, M. Hulot est mis à l’index par un
mélange de jalousie et d’étroitesse d’esprit comme le montre la dernière séquence, où il est ignoré par tous à l’instant des adieux aussi cordiaux qu’hypocrites. Mais Tati / M. Hulot s’en
contrefiche : au milieu de ce monde standardisé, le rire sincère et approbateur d’une – la touriste anglaise raffolant de ses extravagances – ou de deux – le retraité qui vient en douce lui
dire au revoir, à l’insu de son épouse – personnes l’appréciant pour ce qu’il est suffit amplement à son bonheur.

Une réponse à “Éloge de l’inadaptation : Les vacances de M. Hulot, de Jacques Tati (France, 1953)”

  1. Mismo dit :

    Salutation!
    Je suis tombé par hasard sur ton blog (par ailleurs excellent, et je dis pas ça pour faire de la lèche!), et vu la diversité de tes goûts et tes connaissances, je me permets de t’inviter sur un forum que quelques gros tarés de déviants dans ton genre (c’est un complément bien évidemment!) fréquentent. Le forum en question: wildteam.heberg-forum.net.
    On y parle de tout, de Pasolini à Chuck Norris, et on aimerait répandre le virus wildteam!
    J’espère que tu viendras y faire un tour (je précise, sans faire de lèche encore une fois, que je ne propose ça qu’aux gens capables de torcher des papiers correctes, comme c’est très visiblement ton cas, et qui ont un vrai point de vue sur le ciné), et qui sait, que tu nous rejoindras!
    A bientôt j’espère camarade! ;)