• Au fond des bois, de Benoît Jacquot (France, 2010

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fond-1Où ?

Au cinéma La Bastille

Quand ?

Mardi soir, à 20h

Avec qui ?

Seul 

Et alors ?

Fait par un autre réalisateur que Benoît Jacquot, Au fond des bois s’en sortirait avec une critique meilleure. Car, mis en perspective de ses œuvres les plus fortes
(dont la liste est bien fournie : La fille seule, Le septième ciel, A tout de suite…) et du talent qui s’y exprime,
Au fond des bois s’apparente à un « exercice Jacquot » comme il y avait par exemple des « exercices Hitchcock ». Soit des films faits plus pour garder un
rythme soutenu de tournages que pour marquer en soi un grand coup, dans lesquels le cinéaste concerné reprend ses motifs de prédilection et les développe tranquillement, si l’on peut dire, dans
un contexte renouvelé.

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L’arrière-plan, dans Au fond des bois, est le sud de la France du 19è siècle. Jacquot se focalise sur deux différences par rapport à aujourd’hui, avec une réussite
inégale. La coexistence de la langue et des patois d’Oc aux côtés du français officiel, posée frontalement (en particulier via le personnage principal masculin, Timothée), apporte une singularité
évidente. Par contre, les pouvoirs de magnétiseur de ce même Timothée, considérés par les populations de l’époque avec autant de respect que la médecine et les sciences, passent moins bien
l’épreuve de la représentation à l’écran. Sans aller jusqu’à nous rendre incrédules et détachés vis-à-vis du film, ils ne nous envoûtent pas à la hauteur de ce qu’ils pourraient – le cinéma étant
après tout l’art où l’hypnose et autres pratiques occultes sont retranscrites de la manière la plus efficace.

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Le problème vient de l’incertitude, laissée volontairement en suspens tout au long du récit, quant à la valeur réelle de l’emprise de TImothée sur Joséphine, la fille de bonne famille qu’il
enlève et emmène sur les chemins de traverse, géographiques (à travers les bois du titre) et moraux – des relations sexuelles fréquentes et plus ou moins consentantes. Interprétée par
l’ambivalente Isild Le Besco, dont c’est la troisième collaboration avec Jacquot, Joséphine est une énième personnification du thème de prédilection du réalisateur : le désir féminin, son mystère
et sa puissance renversante. La dernière partie de Au fond des bois, durant laquelle se tient le procès de Timothée, sert de révélateur à cette force souterraine, qui
brouille suffisamment les rôles pour semer le doute. Qui était le manipulateur, et qui était la marionnette ? Ce moment où le film intrigue et remue est cependant trop court, coincé entre une
partie road movie qui manque trop de ressort et un épilogue mené à une vitesse supersonique. C’est là un autre point qui me gêne dans Au fond des bois, et dans l’œuvre
récente de Jacquot (il s’exprimait déjà dans son film précédent, Villa Amalia) : une tendance à accélérer exagérément le tempo de l’action par des ellipses certes
maîtrisées mais excessives, qui provoque en définitive un sentiment de simple survol ne laissant pas grand-chose s’imprégner en nous. Ralentis, Benoît !

 

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