• A bord du Darjeeling limited, de Wes Anderson (USA, 2007)

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Où ?
Au MK2 Quai de Seine, dans une des 2 grandes salles au sous-sol

Quand ?
Samedi après-midi, pendant une éclaircie au cœur de cet exécrable week-end de Pâques

Avec qui ?
Ma femme, et une salle bien remplie

Et alors ?

Après le formidable et incroyablement riche portrait de la new-yorkaise Famille Tenenbaum qui l’avait fait connaître de la plus belle des manières il y a 6 ans, Wes
Anderson avait quelque peu déçu les espoirs placés en lui dans son long-métrage suivant, La vie aquatique (où Bill Murray créait une version lunaire, hypocrite et
surtout hilarante du commandant Cousteau). Le film souffrait du syndrome « boule à neige » : tout y était si contrôlé, si sophistiqué, si réfléchi que toute émotion en
disparaissait. Le pitch de A bord du Darjeeling limited, qui envoie 3 frères américains (Francis – Owen Wilson, Peter – Adrien Brody et Jack – Jason Schwartzman) dans un
voyage ouvert à l’imprévu dans un train parcourant l’Inde, semblait pouvoir protéger le film de ces abus. Peine perdue, le naturel du réalisateur revient par la fenêtre du train après en avoir
été chassé par la porte.

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L’Inde ne pénètre jamais réellement le film, hormis à l’occasion de quelques gags initiaux – un taxi lancé à toute allure dans la circulation pour permettre à un personnage d’attraper le fameux
train, des antidépresseurs délivrés sans prescription dont les héros, névrosés américains typiques, font un usage démesuré. Passée cette introduction, Anderson rebat exactement les mêmes cartes
que dans ses films précédents, dans le fond (traumas familiaux irrésolus, personnages d’« adulescents » complètement immatures) comme sur la forme. Sortis de manière quasi métronomique,
ses ralentis sur-travaillés et ses plans vus de face de personnages se regardant dans un miroir commencent réellement à lasser, et à devenir un frein plutôt qu’un atout pour l’épanouissement du
film. De plus, à côté des réellement savoureux ping-pongs verbaux entre les 3 frères, nourris par un talent comique indéniables, certaines scènes (Francis qui enlève ses bandages en plan fixe -
devant un miroir, bien sûr) et détails – l’obsession pour les valises en quantité démesurée – sont de véritables rabâchages de La famille Tenenbaum. Comme si Wes
Anderson était tout bonnement incapable de dépasser l’horizon de ce film fondateur pour lui, quelque soit la distance mise entre lui et New York.

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La voie du salut pour le cinéaste est à chercher dans les 2 courts-métrages présents das …Darjeeling limited. L’un est officiel : Hôtel Chevalier,
dialogue à 2 personnages (Jack, et son ex incarnée par Natalie Portman) dans une chambre d’hôtel parisienne qui ouvre le film. L’autre est un flash-back qui intervient brutalement dans le récit
et le coupe pendant une dizaine de minutes en revenant à New York, le jour de l’enterrement du père des 3 héros, pour suivre une succession d’initiatives irréfléchies et paniquées de ces
derniers. Dans les 2 cas, la limitation à un lieu et à une action précises fait ressortir le meilleur du cinéaste, sa capacité à être légèrement décalé vis-à-vis du réel tout en en déterrant les
aspects les moins plaisants. Hôtel Chevalier est en ce sens particulièrement abouti. Non seulement Anderson s’y maintient avec la manière – en partie grâce au jeu remarquable de ses 2
interprètes – sur le fil ténu entre le drame et le bonheur, mais il le fait sur un thème nouveau pour lui : les relations amoureuses et sexuelles plutôt que les pathos familiaux refoulés.
Peut-être le sujet d’un prochain film ?

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