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- Le discours d’un roi, de Tom Hooper (USA-Angleterre, 2010)
 
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Au ciné-cité les Halles
Quand ?
Jeudi soir, à 22h30
Avec qui ?
Seul
Et alors ?
Chacun sa croix. La France a ses comédies du terroir autoproclamées sympas et proches des gens (la preuve, elles sortent chacune en avant-première dans une région ciblée), dans le sillage de Dany Boon1. Le Royaume-Uni a ses hagiographies de sa famille royale, à la longévité telle qu’elle garantit l’existence d’une intrigue en son sein pour servir de passerelle vers n’importe quelle page de l’histoire générale du pays voire du monde. Les années 1930, période troublée sur laquelle plane une certaine menace germanique2, vous intéressent ? A cette entrée, les Windsor sont en mesure de vous proposer non pas un, non pas deux, mais trois rois d’Angleterre : un mourant, un dépravé, et un bègue. It’s a deal.
Dans un entretien présent sur le DVD de I want to go home, Alain Resnais a cette très belle     phrase que j’ai déjà citée : « un film, soit c’est vivant, soit c’est mort ». Le discours d’un roi est un film mort, ou à tout le moins     sévèrement cryogénisé. Comme 90% des récits d’apprentissage (seuls  les arts martiaux, d’une manière générale, s’en tirent correctement), la  lutte du roi George VI contre son bégaiement est peu     propice à un traitement cinématographique et tombe dans le piège du  triptyque machinal 1) Il n’y arrive pas 2) Montage d’exercices 3) Il y  arrive3.  Pour apporter un peu de chair à ce programme squelettique, le film nous  fait le coup des monologues informatifs tout droit recopiés d’un  article de revue     médicale ou d’une page Wikipedia : on ressort de la salle en étant  calé sur les traumatismes de la petite enfance pouvant causer le  bégaiement, et sur les pratiques permettant d’atteindre la     guérison. Mais des individus qui se trouvent derrière les étiquettes  du patient et du docteur, on n’apprend rien. Et il en va de même pour  l’ensemble des seconds rôles, tant le scénario est     verrouillé de toutes parts, littéralement asphyxié par son obsession  d’énoncer les faits qui égrènent la frise chronologique royale de cette  époque. Le roi George V n’apparaît ainsi que dans deux     scènes : une pour invectiver son fils cadet à propos de son  bégaiement, et une pour mourir. Le premier héritier du trône, Édouard  VIII, ne peut se montrer à l’écran sans être accompagné – ou     précédé – par une remarque d’un tiers sur sa faillite morale (il vit  en concubinage avec une roturière américaine et divorcée) et le fait  qu’il devrait donc abdiquer.
Ce qu’il finit par faire, sans que cela ait donné lieu à une  quelconque montée de suspense ou de drame. Avec le bégaiement du prince  comme prétexte pour glisser le pied dans l’entrebâillement de     la porte du palais, Le discours du roi se résume à un feuilleton Point de vue – Images du monde,  qui repose sur l’idée que, puisqu’ils concernent une famille     royale, les potins sur leur intimité sont en mesure de nous  intéresser en tant que tels, sans avoir à faire d’effort dans leur  traitement ou leur profondeur. Dès lors les protagonistes sont     réduits à leur fonction pratique dans le récit en cours, et  l’éventuelle portée que pourrait avoir celui-ci reste mort-née. Ce que  ce point anecdotique de l’histoire pourrait dire de l’entrée de     la politique dans l’ère de la communication (la gravité de la tare  de George VI est décuplée par l’exigence nouvelle de devoir donner des  allocutions à la radio), ou d’un empire en bout de course     (les colonies alors encore britanniques ne le sont plus pour  longtemps), ne transparait jamais pour la bonne – et triste – raison  qu’il n’a jamais dû effleurer l’esprit du scénariste, rivé à son     ode à l’aristocratie. Tout cela est creux, statique, terriblement  prévisible d’une scène à l’autre. Etouffé dans la naphtaline. Comme Al  Pacino, Kate Winslet et d’autres avant lui, Colin Firth     aura son oscar, au prix d’un film et d’un rôle bien en-deçà de son  talent.
1 dont je n’irai pas voir le nouveau Rien à déclarer ; je renvoie à l’excellent texte de Chronic’art, qui à mon avis dit tout ce qu’il y a à dire sur ce film et ce qu’il symbolise
2 qui transforme le film en point Godwin géant : tout, jusqu’au cadre lui-même, frémit d’angoisse et de rejet à chaque évocation de Hitler, alors qu’en réalité l’attitude anglaise à l’égard de l’Allemagne était autrement plus ambiguë

