• OSS 117 : Le Caire nid d’espions, de Michel Hazanavicius (France, 2006)

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A Austin, Texas, sur la Wii des amis qui nous logent, connectée sur Netflix

Quand ?

Lundi soir

Avec qui ?

MaFemme et nos amis, exposés à l’humour français dans ce qu’il a de meilleur

Et alors ?

Le Caire nid d’espions, premier volet de la renaissance de l’agent OSS 117 (après une précédente série d’aventures qui se voulaient un peu plus sérieuses dans les années
60), est avec Astérix et Obélix : mission Cléopâtrela comédie française la plus drôle de ces derniers temps. L’un et l’autre commençant à dater, il serait temps que la
relève se manifeste… En attendant, on peut – on doit – profiter sans modération de la loufoquerie et de l’habileté de l’humour des aventures d’OSS 117. Et non, les deux adjectifs loufoquerie et
habileté ne sont pas incompatibles. La preuve.

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L’ambition comique du film se mesure au nombre de façons de faire rire abordées. Là où une comédie lambda se contente d’une seule, Le Caire nid d’espions en compte pas
moins de trois différentes. Il y a là l’humour de genre, avec la parodie soft (on n’est pas dans Hot shots !) des séries B d’espionnage de l’après Seconde
Guerre Mondiale ; l’humour de personnage, par le biais de l’idiot inénarrable interprété par Jean Dujardin ; et l’humour de satire auquel cet antihéros conduit naturellement si on l’observe avec
un peu de recul. On ne voit alors plus seulement l’homme, mais autour de lui tout le milieu qui le voit évoluer et qui a fait de lui ce qu’il est. Soit la France des années 50, coloniale,
arrogante, virile, qui vit ses dernières heures avant d’être balayée de toutes parts, intérieurement par les changements de société et extérieurement par les indépendances en cascade, et ne s’en
rend absolument pas compte. Sous sa patine saugrenue (les distributions de photos porte-bonheur du Président René Coty), la charge contre cette France est bel et bien rude. Elle est de plus
élaborée avec largement assez d’intelligence pour s’appliquer dans ses grandes lignes aux restes de suffisance dont notre pays, et ses confrères occidentaux, font preuve aujourd’hui encore.

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Fruit trop mûr de cet environnement dont il est en quelque sorte la « fin de race », Hubert Bonisseur de la Bath alias OSS 117 est un merveilleux idiot du village. Qui doit beaucoup à
l’allure et aux mimiques de Jean Dujardin, mais encore plus aux auteurs (Michel Hazanavicius, cerveau du Grand détournement et Jean-François Halin, ex des Guignols) qui
lui ont taillé ce costume sur mesure. Un seul autre exemple dans le panorama audiovisuel moderne vient à l’esprit pour égaler l’acuité et la drôlerie de son écriture : le Michael Scott de la
version américaine de The office, créé par
Steve Carell
. Michael et Hubert ont saisi toute la quintessence de ce spécimen si particulier d’être humain, imbécile heureux dont l’arrogance et l’étroitesse d’esprit sont par on ne
sait quel miracle contrebalancées par sa candeur et son désir profond de faire le bien. L’ensemble compose un caractère bête mais pas méchant, plus proche de celui d’un enfant de cinq ans – cf.
le jeu favori de Hubert, avec les poulets et leur réaction à la lumière – que d’un personnage sciemment nuisible et gêneur. L’œuvre qui
l’accueille doit donc le traiter en conséquence, c’est-à-dire avec moquerie (OSS 117 ne bénéficie d’aucun passe-droit ni indulgence : quand il se rate, le film rit ouvertement à ses dépends) mais
aussi avec l’idée générale de le laisser vivre sa vie et non de l’enfoncer tant et plus. OSS 117 rencontre des fois le succès (son irrésistible tour de chant, sa connaissance des hiéroglyphes),
et même s’il n’y est pas forcément toujours pour grand-chose c’est important car ce n’est pas un mauvais bougre. Simplement un crétin.

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Et le meilleur moyen pour permettre à ce crétin de triompher est encore… de le faire affronter d’autres crétins. C’est là qu’entre en jeu le troisième humour de Le Caire nid
d’espions
, celui de la parodie de films d’espionnage. Qu’ils soient des nazis sur le retour, des fondamentalistes musulmans avides de révolution ou des concurrents dans l’élevage de
poulets – génial numéro de François Damiens, qui vole les deux scènes dans lesquelles il apparaît –, ce sont avant tout des incapables dont les aptitudes sont loin d’être à la hauteur de leurs
ambitions. Cette médiocrité généralisée des protagonistes suffit à saborder de l’intérieur un récit d’espionnage en soi tout ce qu’il y a de plus sérieux. Et à assurer le succès du film : car
s’il s’inspire régulièrement de la BD ou du jeu vidéo, l’humour de Le Caire nid d’espions reste en permanence un humour de pur cinéma, pensé en termes de cadres, de
coupes, de montage. On en redemande [mais, malheureusement, le deuxième
épisode
des aventures d'OSS 117 ne réitère pas l'exploit].

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