• La splendeur des Amberson, d’Orson Welles (USA, 1942)

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Où ?

A la maison, en K7 vidéo enregistrée il y a longtemps sur Arte (à la suite se trouve Boys don’t
cry
)

Quand ?

Dimanche après-midi

Avec qui ?

Seul

Et alors ?

La splendeur des Amberson est, incontestablement, un film d’Orson Welles. Chaque plan porte la marque de son sens unique, renversant, du décor et de son remplissage, du cadrage
(incroyables plongées, contre-plongées et autres angles de vue désaxés) et du hors champ. 2 séquences sont particulièrement marquantes : un bal grandiose donné dans le manoir des Amberson et
dont l’on sent la perfection par la durée de la séquence, la virtuosité des mouvements de caméra, la quantité faramineuse d’accessoires et de figurants dans tous les coins du cadre ; et une
ballade en famille dans la campagne enneigée, où Welles fait de l’irréalité du tournage en studio une source florissante de beauté fantasmée et idyllique.

Cette vision enfantine de la pureté d’un paysage recouvert par la neige fait écho à une des scènes-clés du 1er film de Welles, l’illustre Citizen Kane tourné à peine un an plus
tôt. D’autres visions sont communes aux 2 longs-métrages – ainsi ces plans de vieux hommes richissimes mais abandonnés à leur solitude au fond d’un immense palais. C’est par ailleurs le même
thème qui parcourt l’un et l’autre des films, une description hantée par l’échec d’une vie humaine où l’innocence de l’enfance n’est retrouvée qu’à l’approche de la mort, après avoir gâché l’âge
adulte à force d’arrogance et de choix impulsifs et brutaux. Malgré cette filiation et quelques autres beaux sujets évoqués (la révolution automobile et le changement d’ère qu’elle marque, la
survivance d’un amour fou à travers les années), la question se pose de la justesse du choix de l’œuvre littéraire portée à l’écran.

Telle qu’elle apparaît, l’histoire centrale du film (le dernier-né de la lignée des Amberson s’oppose au remariage de sa mère avec un homme d’un rang inférieur) n’est faite que de potins de bas
étage, et le personnage qui la porte est bien trop antipathique et unidimensionnel. Cependant, il est difficile de répartir précisément la part de faute entre Welles lui-même et le studio. La
base choisie et développée par le cinéaste n’était sûrement pas la meilleure qui soit, de même que sa décision de partir au Brésil pour le tournage d’un documentaire à peine le 1er montage de
La splendeur des Amberson achevé était particulièrement maladroite, pour ne pas dire inconsciente. Mais le charcutage sans merci opéré par la RKO reste l’un des plus déchaînés et
honteux jamais réalisés, même selon les standards d’Hollywood.

Echaudée par les problèmes rencontrés sur Citizen Kane, pour au final un retour sur investissement médiocre, la RKO a ramené le film de 135 minutes à… 80 seulement. Bien que
moins saisissant que celui de Citizen Kane, le scénario d’origine avait sûrement autre chose à offrir que cette peau de chagrin faite d’enchaînements bâclés et de personnages
vignettes, qui laissent supposer que des pans entiers ont été supprimés. La fin, retournée sur ordre du studio et qui laisse tout en plan, en est le plus terrible exemple. Tel quel (et rien ne
laisse espérer de récupérer tout ou partie des scènes perdues), La splendeur des Amberson n’est pas à proprement parler un film : il ressemble plus à ces pans de murs
couverts d’hiéroglyphes à moitié effacés, irrémédiablement, et qui en tirent un pouvoir d’attraction empli de mystère.

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