• Jimmy’s hall, de Ken Loach (Angeterre-Irlande, 2014)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Lundi, à 11h30

Avec qui ?

MaBinôme

Et alors ?

Jimmy’s hall est le prolongement naturel de trois films récents de Ken Loach, pourtant fort distincts les uns des autres : Le vent se lève pour la période historique (après le soulèvement de 1919, nous voici dix ans plus tard, dans l’Irlande indépendante mal-née), La part des anges pour la modestie – les voix plus critiques parleront de pauvreté – de la forme employée, et son documentaire L’esprit de 45 pour la prépondérance du message sur l’histoire qui en est porteuse. Comme dans ce dernier film, il importe ici surtout à Loach d’affirmer ses convictions politiques et sociales. La qualité intrinsèque du long-métrage lui servant de tribune est secondaire. Ce qui fait de Jimmy’s hall une œuvre à l’intérêt artistique assurément limité. Visuellement quelconque, narrativement dilettante et parfois laborieusement mené, on y retrouve le même genre de service minimum vis-à-vis du cinéma de fiction que celui qui était de mise pour le documentaire dans L’esprit de 45. Loach ne fait même plus mine de soigner l’enrobage. Il a décidé qu’il avait passé l’âge de se concentrer sur autre chose que ses seules intentions. Ses films n’empruntent plus la forme indirecte de la parabole, de l’exemple, ils s’en remettent au discours direct des thèses défendues et des utopies rêvées.

Dans ce cadre les enjeux et l’incarnation individuels des personnages sont squelettiques. À l’inverse l’aspiration du cinéaste à commenter le monde, à dénoncer les injustices et montrer la voie qu’il juge équitable (le plan final de Jimmy’s hall est éloquent sur ses intentions : inspirer la jeunesse), est toujours aussi vivace, acérée, pertinente. Entre ses mains, l’Irlande des années 1930 dialogue avec une gamme étonnamment riche et variée de sujets et de contextes plus récents, voire tout à fait actuels. La lutte non-violente de Gandhi en Inde ; les mouvements des paysans sans terre en Amérique du Sud ; la brutalité intellectuelle et physique infligée à leurs citoyens par les états se livrant à l’intégrisme religieux, tel l’Iran. La salve critique touche jusqu’aux pays développés et pacifiés en général (la frayeur qu’inspirent à la part réac de la population les musiques « obscènes », hier le jazz, aujourd’hui le rock, le rap, la techno), jusqu’à la France en particulier. La tirade de Jimmy pourfendant le mensonge selon lequel les intérêts des classes populaires et ceux des détenteurs du capital, du pouvoir, seraient les mêmes, paraît répondre directement au dogme unique du pouvoir actuel, affirmant que seul ce qui est bon pour les entreprises et ceux qui les dirigent est bon pour nous tous. La valeur cinématographique de Ken Loach est peut-être caduque, mais sa verdeur humaine et indocile force sacrément le respect et rend sa voix essentielle.

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